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1 milliard de francs sous le nez des horlogers suisses
Culture

1 milliard de francs sous le nez des horlogers suisses

lundi, 7 juillet 2014
Par Quentin Simonet
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Quentin Simonet

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5 min de lecture

Les contrefaçons de montres suisses représentent un manque à gagner annuel d’un milliard de francs ou l’équivalent de quelque 1’000 emplois dans le pays. L’an dernier, la FH a fait saisir un million de fausses montres. Tout acheteur de contrefaçons s’expose à de lourdes sanctions.

Il fait une température idéale. Au loin, la mer se décline en un camaïeu de bleus. Les chaises longues en bord de plage invitent à une petite sieste réparatrice. L’atmosphère est résolument aux vacances en ce début d’été. Avant l’apéritif, c’est l’heure du shopping. Et pourquoi ne pas craquer pour l’une de ces fausses Rolex, IWC, Chopard, Panerai ou Vacheron Constantin aperçues sur l’un des étals de la station balnéaire où vous passez quelques jours de farniente ? Une sorte de clin d’œil au temps qui passe trop vite. Surtout en vacances.

N’y songez même pas. Car l’achat de contrefaçons n’est pas un acte anodin. En tant qu’acheteur, vous vous exposez à des sanctions pénales, civiles et douanières, rappelle la Fédération de l’industrie horlogère suisse (FH). Dans de nombreux pays, la simple possession de biens contrefaits est même considérée comme une infraction. De plus, des dommages et intérêts peuvent être réclamés par les titulaires des droits de propriété intellectuelle. Les autorités douanières sont aussi habilitées à saisir et détruire les produits illégaux et à prononcer d’importantes amendes. En Suisse, l’importation d’une montre contrefaite est interdite par la loi, même pour une pièce unique achetée en toute bonne foi à des fins privées.

Au niveau mondial, la contrefaçon contribue à supprimer chaque année plus de 200'000 emplois, dont 100'000 en Europe.
Des contrefaçons de meilleure qualité

Alors, le jeu en vaut-il vraiment la chandelle ? Assurément pas. En achetant une montre contrefaite, entre autres tares, vous financez le crime organisé, soutenez le travail clandestin et celui des enfants, acceptez le pillage du savoir-faire et détruisez des emplois. Cette industrie clandestine engendre également un coût pour les entreprises lésées. Le préjudice du faux et du piratage se chiffre à CHF 2 milliards (EUR 1,65 milliard) pour la Suisse et à environ EUR 500 milliards (CHF 600 milliards) au niveau mondial. Bien qu’il soit difficile de chiffrer un tel marché, il représente aujourd’hui, selon l’OCDE, quelque 5 à 7 % du commerce mondial, contre 3,5 % en 1990.

Et l’horlogerie helvétique est particulièrement impactée. Quelque 40 millions de fausses montres suisses sont mises en vente chaque année, alors que l’industrie horlogère « Swiss made » ne produit que 30 millions de garde-temps originaux. La montre est même le deuxième produit le plus contrefait, après le textile. Alors que la perte était estimée jusqu’ici à environ CHF 800 millions (EUR 650 millions) pour la branche, ce montant a augmenté ces dernières années, relate Michel Arnoux, responsable du service anti-contrefaçon auprès de la FH.

En cause ? Des contrefaçons dont la qualité s’améliore nettement et donc un prix moyen qui a lui aussi progressé. Exemples : les mouvements mécaniques chinois sont devenus de meilleure facture, les vis sont polies, l’usage de matériaux plus prestigieux comme la céramique se répand et l’utilisation de joints se généralise. « À l’heure actuelle, les contrefaçons ont peut-être bien atteint, dans certains cas, la qualité des montres originales mises sur le marché il y a un peu moins d’une décennie », constate, amer, Michel Arnoux. Il n’est désormais pas rare de trouver de fausses pièces à EUR 800 (CHF 970). Au final, le manque à gagner pour l’ensemble de l’horlogerie s’élèverait aujourd’hui plutôt à un CHF 1 milliard (EUR 820 millions). Soit, schématiquement, l’équivalent de 1’000 postes de travail dans l’horlogerie. Au niveau mondial, la contrefaçon contribue à supprimer chaque année plus de 200’000 emplois, dont 100’000 en Europe.

La sensibilisation des autorités à ce thème est pour nous prioritaire.
Michel Arnoux
Multiples canaux de distribution

Les raisons de ces activités frauduleuses sont multiples, relate Michel Arnoux. En premier lieu, Internet. Offrant des produits contrefaits sous couvert d’anonymat et sans intermédiaire physique, la toile a bouleversé la distribution des fausses montres et considérablement dopé les ventes. En deuxième lieu, la contrefaçon se révèle un moyen très efficace de blanchir l’argent provenant d’autres activités illicites, constituant de ce fait un secteur d’activité très convoité par des personnes sans scrupules. Elle est aussi utilisée pour l’évasion fiscale. À tel point que le FBI s’y intéresse de près. La FH a d’ailleurs formé l’an dernier plusieurs agents spéciaux au siège même de l’organisation, à Arlington, en Virginie. « La sensibilisation des autorités à ce thème est pour nous prioritaire », commente Michel Arnoux.

Le problème, c’est que cette économie ne connaît pas la crise. La FH a ainsi fait saisir un million de fausses montres l’an dernier. Si le chiffre est plus ou moins stable d’une année à l’autre, cela ne veut pas dire que le phénomène est sous contrôle. Les pays les plus concernés sont la Chine et la Thaïlande en Asie ainsi que l’Italie en Europe. Dans la foulée, en 2013, la FH a fait stopper 28’0000 enchères qui proposaient de fausses montres et a fait fermer plusieurs sites dédiés aux contrefaçons.

La difficulté de cette lutte, qui s’apparente au rocher de Sisyphe, réside aussi dans la multiplicité des canaux. La distribution, qui s’opère généralement par le biais des grossistes, en utilise cinq principaux : Internet, les vendeurs de rue, de petits étales mobiles installés dans les zones commerciales ou touristiques, les magasins offrant ouvertement des contrefaçons dans certains pays et, finalement, la vente via des petites annonces ou publicités. Pour mener la charge, il y a l’embarras du choix.

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