Des stimuli créatifs

Comme l’explique Alexandre Peraldi, directeur Design de Baume & Mercier, « en ce début d’année 2015, on constate que les Maisons horlogères se sont assagies. Non pas tellement en ce qui concerne les calibres, toujours sujets à de nouveaux développements, mais surtout en termes de look et d’esthétisme. Après les années vintage, place au classicisme ». Pour preuve, en ce début d’année, Baume & Mercier remet sa bien nommée Classima de 1996 sur le devant de la scène en version homme et femme. « Ce retour aux vertus de lignes plus sobres n’empêche pas les Maisons de proposer de nombreuses extensions de ligne, des pièces anniversaires, voire de nouvelles collections, constate le designer horloger Éric Giroud. Alors même si cela correspond à l’attente des clients, il faut relever que les marques osent s’engager dans des zones à risque, même dans un environnement plutôt chamboulé comme celui que nous connaissons. Maître mot de cette incursion audacieuse : la créativité. »

Introspection historique

« Classique » et « créative », tels pourraient en effet être les qualificatifs recouvrant la démarche de Vacheron Constantin, qui dévoilait, à l’occasion du 260e anniversaire de sa fondation, les sept premiers modèles de sa nouvelle collection Harmony. « Réalisés en séries limitées, ces garde-temps contemporains arborent une forme coussin et un design inspirés de l’un des premiers chronographes en montre-bracelet de la marque présenté en 1928, explique la Maison. Au cœur des boîtiers, les calibres conçus, développés et produits en interne mettent le chronographe monopoussoir à l’honneur. » Parmi les marques qui osent une nouvelle gamme, à noter également la présence de Cartier, une Maison coutumière de collections qui font référence comme la Ballon Bleu, dernière en date présentée en 2007. Avec ses lignes simples et néanmoins architecturées, avec une carrure galbée tout en finesse et son cadran répondant aux codes de la marque, cette Clé présentée au SIHH 2015, nom dérivé de sa couronne, est dotée du tout nouveau calibre 1847. Encore une référence historique, correspondant à la date de fondation de Cartier. Encore un calibre permettant d’ancrer plus avant la Maison dans la Haute Horlogerie.

Comme si cela ne suffisait pas, une troisième collection inédite a également eu les honneurs du SIHH. Aux avant-postes : Montblanc et ses Heritage Chronométrie. Une nouvelle introspection historique voit cette fois la Maison accompagner Vasco da Gama à bord de son vaisseau parti à la découverte de la route des Indes en 1497 par voie maritime. « L’esprit pionnier et les compétences nautiques de Vasco da Gama ont inspiré Montblanc pour créer une nouvelle collection de montres qui fait le lien entre l’obsession pour la précision des navigateurs portugais et les racines de la Haute Horlogerie. La précision, graal de l’horlogerie depuis toujours, est devenue synonyme du terme “chronométrie”, qui se définit comme la mesure précise du temps. L’héritage de Haute Horlogerie a donné le nom à la nouvelle collection Heritage Chronométrie. »

Un hommage appuyé

Autant pour les collections mais du côté des anniversaires, la moisson de montres est tout aussi riche. Un jubilée d’importance d’abord, celui de Roger Dubuis, qui fête ses 20 ans d’existence avec une montre Hommage Répétition Minutes Tourbillon Automatique. Ce n’est toutefois pas cette pièce que la Maison mettait en avant lors du Salon mais sa collection Excalibur Squelette déclinée en simple et double tourbillon, également en version heures et minutes automatique, pour bien marquer sa différence mécanique soulignée par une première mondiale : une lunette en caoutchouc sertie de diamants. « Nos montres à mouvements squelettes représentent une classe à part, à l’architecture forte et typée, expose Alvaro Maggini, Directeur de création chez Roger Dubuis. Cette année, nous les avons intégrées dans la ligne Excalibur, qui est, elle aussi, emblématique de la marque. Au final, nous arrivons avec des produits qui représentent parfaitement l’âme de Roger Dubuis, une âme ténébreuse et volontariste. »

Plusieurs Maisons célèbrent également une date clé de leur histoire. Pour IWC, c’est le lancement de sa Portugaise il y a 75 ans. A. Lange & Söhne, tout comme Audemars Piguet, soulignent la création de la Saxonia pour la première et de la Millenary pour la seconde, deux modèles phare nés il y a exactement 20 ans. Inutile de dire que ces anniversaires sont autant d’occasions de donner un second souffle à ces montres emblématiques, notamment chez IWC, qui, à son habitude, revisite complètement la gamme. Audemars Piguet, pour sa part, s’étoffe sur le versant féminin. Quant à A. Lange & Söhne, classicisme oblige, c’est sur les tailles et les complications utiles que la marque étend son exploration. Reste à relever la démarche de Jaeger-LeCoultre, qui met en avant une pièce astronomique à grande complication de 1895  dotée d’un quantième perpétuel à phases de lune, d’un chronographe et d’une répétition minutes. Un 120e anniversaire qui incite la manufacture à vouloir faire partager sa fascination pour le mouvement des astres et qui en fait ainsi sa source d’inspiration pour cette année 2105. « Par ses nouvelles créations, Jaeger-LeCoultre illustre ce que les anciennes civilisations ont observé et qui rythme aujourd’hui nos existences », explique la Maison. Un voyage astronomique qui, encore une fois, rend hommage à l’histoire.