>SHOP

restez informés

Inscrivez-vous à notre newsletter mensuelle pour recevoir des infos et tendances exclusives

Suivez-nous sur toutes nos plateformes

Pour encore plus d'actualités, de tendances et d'inspiration

Toujours deuxième
Histoires de montres

Toujours deuxième

lundi, 21 septembre 2009
fermer
Editor Image
Alexey Tarkhanov
Journaliste, architecte et critique d’art

“La montre marche grâce à la force de la passion humaine.”

« L’horlogerie est beaucoup plus une mécanique du monde qu’une mécanique de la mode. »

Lire plus

CLOSE
5 min de lecture

Tout collectionneur qui se respecte dispose d’une « deuxième » montre, soit un modèle solide et bon marché qu’il porte pour ne pas mettre ses « grandes complications » en péril. Seulement le choix reste pour l’instant très limité. Un nouveau marché ?

Si vous ne buvez tous les jours que du Romanée-Conti, que vous conduisez seulement des Lamborghini et que vous mangez uniquement dans les trois étoiles du Guide Michelin, vous avez probablement quelques graves problèmes psychologiques. Vous souffrez peut-être d’un sentiment d’incomplétude. Mais si vous portez exclusivement des montres à grandes complications, cela devient tout à fait compréhensible car vous êtes sûrement un collectionneur.

Breguet ou Swatch

Mais même les collectionneurs ont besoin de montres plus « casual » afin de ne pas gaspiller leurs trésors. Je me souviens de ma dernière rencontre à Bâle avec Nicolas G. Hayek. Le patron de Breguet parlait comme un prophète devant ses disciples. Pour écrire mon article, il ne restait plus qu’à écouter l’enregistrement de cette conversation. Mais sur la bande de mon dictaphone, toutes les deux minutes, j’entendais comme un coup qui résonnait dans mes oreilles. Des coups qui ponctuaient le discours de Nicolas G. Hayek à mesure qu’il frappait la table de ses mains ornées comme d’habitude d’une demi-douzaine de montres. Et chaque coup mettait mon cœur en émoi car c’était le Double Tourbillon Breguet qui cognait la table avec force.

A l’assaut des remparts du luxe

Le charismatique personnage à barbe blanche n’avait pas réglé le bracelet de sa montre si bien qu’elle tournait autour de son poignet. Le fondateur et Président du Groupe Swatch n’y prêtait toutefois aucune attention. Peut-être avait-il une confiance aveugle dans la qualité divine du pare-chute d’Abraham-Louis Breguet ? Ou peut-être avait-il dans son tiroir une avalanche de Double Tourbillon à 300’000 euros pièce. Qui sait ? Au même poignet, il arborait toutefois une autre montre avec laquelle il pouvait bien gesticuler sans risque. C’était sa vieille Swatch en plastique, conçue précisément comme une « deuxième montre » (Second Watch) au prix imbattable de 50 francs suisses.

Un bon quart du siècle s’est écoulé depuis 1983, année de l’apparition de la Swatch. N’est-il d’ailleurs pas étrange que cet objet bon marché reste pratiquement la seule alternative en termes de deuxième montre ? Un objet de qualité dont le prix n’a pratiquement pas varié alors que ceux des « premières » montres n’ont cessé de grimper. Les grandes marques ont en effet commencé à sertir leurs modèles de pierres précieuses, à remplacer l’or trop modeste par le platine et à insérer des tourbillons partout où c’était possible. Puis les marques de moyenne gamme se sont mises à leur tour à escalader les remparts du luxe. Pour leur deuxième montre, les clients ont alors dû chercher des modèles à des niveaux de prix où l’on ne trouvait autrefois que les « premières ».

Mais il n’est pas facile d’élaborer un hybride qui pourrait réunir les qualités de différents modèles imaginés par les meilleures marques.

La situation reste paradoxale ! Sans parler d’argent, il est très facile d’imaginer une collection représentative de « premières » montres. Mais pour ce qui est de la deuxième, le choix d’un modèle reste très limité. A mon avis, dans les années de crise, les marques gagnantes seront celles qui pourront proposer aux clients une deuxième montre prestigieuse, de qualité, susceptible de prendre la place qu’occupe toujours la Swatch. Mais il n’est pas facile d’élaborer un hybride qui pourrait réunir les qualités de différents modèles imaginés par les meilleures marques.

Seuil psychologique

Tentons une description : une boite ergonomique, de forme classique, avec un cadran très lisible comme la montre Portugaise d’IWC ; une boite inoxydable, hypoallergénique, dure comme du diamant et léger comme du balsa, à la manière des montres en céramique dont la technologie est maintenant utilisée par Jaeger-LeCoultre pour sa Reverso Squadra Polo Fields ; un mouvement à l’épreuve des chocs, simple et sûr comme une Kalachnikov, qui ne posera pas de problèmes d’entretien durant des années ; un mouvement quartz n’est pas exclu mais un calibre à remontage automatique serait plus approprié, produit avec un niveau de qualité Rolex ; doté de « petites » complications utiles comme un deuxième fuseau horaire ou une grande date : étanche à 50-100 mètres ; sur un bracelet longue durée, synthétique, agréable au porter, qui ne craint ni la sueur ni l’eau salée comme pour la J12 de Chanel ou alors en cuir spécialement traité comme chez Baume & Mercier ; en un mot une montre exemplaire, un archétype qui ne coûterait pas plus de 2’000 francs.

Portugaise Répétition Minutes édition limitée © IWC
Portugaise Répétition Minutes édition limitée © IWC

Peut être est-ce là un projet qui n’est pas destiné à une seule entreprise mais plutôt à un groupe doté d’importants moyens technologiques et financiers ? Parce qu’un tel modèle hypothétique doit être de bonne famille et non un parvenu. Il subsiste toutefois un grave problème psychologique. Une grande marque peut-elle véritablement se permettre d’éditer une montre dans des gammes de prix nettement plus basses que celles de ses collections de base ? De leur côté, les constructeurs automobiles ont résolu le problème en produisant des petite voiture luxueuses très demandées par le marché. Le seul danger, c’est que la deuxième montre, vu ses qualités, prenne alors la place de la première !

Haut de page