Salon QP à Londres, c’est un mélange des genres dont les Anglais raffolent. Si l’on en croit la fréquentation annoncée en hausse de 23 %, plus de 8’500 visiteurs ont en effet pris le chemin de la Galerie Saatchi, qui abritait la 7e édition de ce salon horloger. Salon horloger ? Certes, mais mâtiné de présentations diverses allant de systèmes audio haute fidélité à des voitures de sport, en passant par des pianos, voire des fragrances, le tout dûment perlé de gouttes champenoises. Les savoir-faire horlogers n’en restent pas moins le cœur de cible des aficionados qui avaient fait le déplacement. Avec 86 marques présentes, la plus large palette de Maisons réunies par les organisateurs, ils n’ont pas été déçus. D’autant que la science horlogère n’avait pas adopté pour l’occasion un seul et même mode d’expression mécanique.
Pour preuve, à quelques pas du stand Tudor, où trônait incongrûment un immense bloc de glace enfermant comme un défi la dernière-née de la Maison, la North Flag équipée du MT5621, son tout premier mouvement de manufacture, la présence de Shinola, une marque créée en 2011 à Detroit qui entend quelque peu faire oublier les déboires d’une ville industrielle déclarée en état de faillite il y a deux ans. Et pour ce faire, la compagnie a conçu de toute pièce une « manufacture horlogère » dans ce fief décati de l’industrie automobile américaine. Par manufacture horlogère, il faut certes préciser qu’il s’agit là d’une unité d’assemblage de mouvements à quartz, en l’occurrence des mouvements Ronda, le partenaire suisse de Shinola qui a assuré la formation des « artisans » d’une entreprise américaine en outre productrice de vélos haut de gamme comme d’articles de maroquinerie. Avec 450 collaborateurs, Shinola n’en fait pas moins partie cette vague de ré-industrialisation qui est en train de redorer le blason du « made in USA » dans une cité que l’on voyait déjà perdue.
Des pièces d’exception
C’est précisément cette conjugaison d’approches différentes qui fait le Salon QP. À quelques encablures des montres électroniques rétro chic de Shinola, les amateurs ont ainsi pu s’extasier devant les dernières réalisations de Roger Smith, le fils spirituel de feu George Daniels, qui est aujourd’hui considéré comme le plus grand horloger britannique en activité. Étant donné que Roger Smith a réalisé 80 montres depuis 2001, le fait d’avoir sous les yeux quatre de ses garde-temps était déjà un événement exceptionnel. Mieux encore, parmi eux, la Série IV, soit un triple calendrier instantané qui représente le dernier développement de l’horloger depuis dix ans.
Au rang des pièces exceptionnelles qui faisaient leur première apparition publique à Londres, à noter également l’Opus 14 de Harry Winston, la Legacy Machine Perpetual de MB&F et la Montblanc 1858. Quelques marques nouvellement apparues sur le marché avaient aussi choisi QP pour leur galop d’essai. Parmi elles, la zurichoise Brüggler, qui propose des montres hautement personnalisables, la britannique Dennison, fraîchement relancée et, surtout, Czapek & Cie, qui compte Jean-François Mojon comme motoriste et Ferdinand Berthoud, du nom d’un horloger célèbre du XVIIIe siècle à qui le coprésident de Chopard Karl-Friedrich Scheufele a voulu donner une deuxième vie avec des montres d’exception à l’instar du premier Chronomètre FB1.
Expos à foison
Sans ses expositions, le Salon QP ne serait pas véritablement ce grand rendez-vous horloger réunissant des noms confirmés comme Vacheron Constantin, A. Lange & Söhne, Montblanc ou F.P.Journe aux côtés de « jeunes premiers » comme H. Moser & Cie, de Bethune, Laurent Ferrier ou Manufacture Royale. Et dans ce registre, la manifestation est restée fidèle à son éclectisme. Les visiteurs ont ainsi pu se laisser charmer par des montres de Haute Joaillerie réunies au sein de « Gems of Time », exposition animée par Backes & Strauss, Bulgari, Gemfields, Harry Winston, Jaeger-LeCoultre et Piaget. Chemin faisant, ils ont pu admirer les garde-temps vainqueurs du récent Grand Prix de l’Horlogerie de Genève, avant de visiter « Inside a Second », espace dédié à l’histoire du chronographe réalisé en collaboration avec la Fondation de la Haute Horlogerie. Pour les plus assidus, un programme d’une dizaine de séminaires était également à disposition. Question de bien comprendre que, finalement, une montre est bien davantage que la somme de toutes ses parties.