Si vous n’avez jamais entendu un vendeur ou une vendeuse vous expliquer qu’il faut « accessoiriser » une tenue, c’est qu’il y a bien longtemps que vous n’avez pas mis les pieds dans une boutique autre que virtuelle. Et en matière d’horlogerie, c’est souvent le bracelet qui fait office d’accessoire. Délaissez donc votre écran quelques heures et passez au SIHH. Vous y serez surpris par l’ingéniosité stylée des bracelets interchangeables de Cartier, le raffinement des créations féminines de Roger Dubuis et le sublime des pièces de haute joaillerie dévoilées par Audemars Piguet. La réalité plus forte que le virtuel…
Le bracelet n’est plus « accessoire »
Depuis quelques années, les femmes sont à l’honneur au SIHH. On se souvient par exemple du bracelet de type gourmette présenté par Richard Mille en 2015. Entièrement en or, fabriquée et finie à la main, cette maille – étonnamment légère et ergonomique – s’intégrait parfaitement au puissant design des RM 07-01 et RM 037. Une gageure esthétique.
En 2016, le raffinement du bracelet en maille milanaise de la Limelight Gala de Piaget, qui a récemment reçu le prix de la Montre Dame au Grand Prix d’Horlogerie de Genève, avait particulièrement retenu l’attention. Cet admirable travail d’orfèvre fait écho aux nombreux bracelets tricotés et torsadés proposés par l’horloger-joaillier depuis les années 1970. Son astucieuse boucle coulisse, aussi simple à manipuler qu’une boucle ardillon, permet à ces dames d’ajuster leur bracelet au millimètre près.
Mais ce sont les bracelets interchangeables de la collection Overseas de Vacheron Constantin qui ont véritablement marqué les esprits l’année passée, car ils annonçaient une tendance durable. Lancé en 1996, ce charismatique modèle a reçu pour ses 20 ans un set de trois bracelets amovibles et interchangeables dotés d’un ingénieux dispositif qui permet de permuter bracelets et boucles sans outil. Un système d’ajustement manuel rapide permet par ailleurs d’allonger le bracelet en métal de plusieurs millimètres pour gagner en confort tout au long de l’année.
La tendance de l’interchangeabilité se confirme d’ailleurs cette année au salon genevois, notamment chez Cartier, qui propose une impressionnante palette de bracelets facilement amovibles en cuir colorés pour les modèles Ronde Solo et Tank Solo.
Roger Dubuis : la belle et la bête
Roger Dubuis, grand spécialiste des mécaniques architecturales et techniques passé maître dans l’art de la mise en scène, « lâche » l’Excalibur Spider Full Carbon dans les allées du SIHH. Répondant à l’audace technique du mouvement squeletté en platine et carbone, le bracelet joue avec les matières : une base en caoutchouc noir avec coutures rouges et incrustations de velours côtelé rouge sur boucle déployante en titane avec revêtement DLC. Idem pour le bracelet de la volcanique Excalibur Quatuor Cobalt (en chrome-cobalt), qui présente une base de caoutchouc noir émaillée d’incrustations en agneau bleu avec couture rouges. Ces couleurs très appuyées reprennent judicieusement le chrome-cobalt, le rouge et le bleu du mouvement, et soulignent parfaitement le design viril de la « bête ».
Pour l’apprivoiser, la « belle » portera l’une des trois créations de la marque au Poinçon de Genève dédiées à l’âge d’or hollywoodien. Elles se différencient grâce à leurs bracelets conçus et réalisés par le bottier parisien Massaro : un motif de cuir plissé dans les tons dorés, d’exquises plumes noires tressées par Laurence Le Constant, une rangée de perles lovée dans un repli de cuir argenté.
Chanel J12 XS : excessivement vôtre
Créée par Jacques Helleu en 2000, la J12 en céramique de Chanel est l’un des plus grands succès horlogers du XXIe siècle. La J12 XS, sa petite sœur, qui n’est pas exposée au SIHH mais a fait une entrée remarquée aux États-Unis, à Paris et plus récemment à Genève, semble bien décidée à marcher sur les traces de son aînée. Disponible en noir ou en blanc, les couleurs phares de l’univers de Chanel, elle est plus petite et montée sur un fin bracelet en veau verni d’une extrême souplesse. Il coulisse sur une manchette assortie en veau mat, ganse en veau argenté, boucle ardillon et passants en acier. Les plus audacieuses la porteront sur le bracelet de force en veau verni avec passants en acier serti de diamants qui joue parfaitement du glam, du chic et du rock dans un esprit fidèle à la marque.
Audemars Piguet : âmes sensibles, s’abstenir
Si vous pensez avoir tout vu en horlogerie-joaillerie, c’est que vous n’avez pas encore visité le stand Audemars Piguet. Après avoir présenté la surprenante Diamond Punk en 2015 puis l’extravagante Diamond Fury l’année suivante, la manufacture horlogère du Brassus s’est surpassée. La Diamond Outrage, troisième volet de sa trilogie, est tout simplement prodigieuse. La beauté scintillante de cette forêt de sapins enneigés – ou de stalagmites givrées – évoquant poétiquement la Vallée de Joux en hiver ne peut laisser indifférent. Et si l’esthétique ne fait pas l’unanimité, la maîtrise technique du serti neige et du serti invisible séduira les plus sceptiques. La 3D est décidément plus belle en vrai.