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Ère de changements
Economie

Ère de changements

mercredi, 15 février 2017
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Christophe Roulet
Rédacteur en chef, HH Journal

“Vouloir est la clé du savoir.”

« Une trentaine d’années passées dans les travées du journalisme, voilà un puissant stimulant pour en découvrir toujours davantage. »

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7 min de lecture

Les difficultés rencontrées depuis 18 mois sur les marchés horlogers se traduisent par un grand remue-ménage au sein des entreprises de la branche. Aux résultats financiers contrastés répond une valse de CEOs sur un tempo impetuoso. Qui part ? Qui reste ? Et après ? Tour d’horizon.

Est-on parvenu à la fin d’une époque ? Rarement les instances dirigeantes des grandes compagnies horlogères n’avaient subi en même temps pareil chambardement. En fin d’année dernière, c’est Richemont qui ouvrait les feux en annonçant une vaste restructuration du groupe. Celui-ci sera désormais emmené par une direction bicéphale constituée de Jérôme Lambert et Georges Kern, deux hommes du sérail qui viennent remplacer Richard Lepeu, directeur général en partance à la fin de l’exercice fiscal en cours, en même temps que le directeur financier Gary Saage. Cette première vague de nominations, qui incluait le remplacement des deux nouveaux hommes forts de Richemont, précédemment aux commandes de respectivement Montblanc et IWC, présageait en fait une réorganisation nettement plus vaste dont le marché bruissait depuis déjà des mois. Au terme du Salon International de la Haute Horlogerie, confirmation était donnée fin janvier.

Jérôme Lambert

Après IWC et Montblanc, c’était donc au tour de Vacheron Constantin, Piaget et Jaeger-LeCoultre de connaître à leur tour un changement annoncé de CEO. Si l’on tient compte des récentes nominations de Cyrille Vigneron, au sommet de la pyramide Cartier depuis janvier 2016, et de Nicolas Bos, qui a repris les rênes de Van Cleef & Arpels en 2013, le changement de génération au sein de Richemont prend des allures de raz-de-marée. Seule une poignée de marques semblent pouvoir miser sur la continuité, à commencer par Roger Dubuis, fièrement emmené par Jean-Marc Pontroué, suivi de Baume & Mercier, pour lequel Alain Zimmermann semble bel et bien avoir trouvé la formule gagnante, et finalement d’A. Lange & Söhne, marque saxonne de prestige préservée sous la houlette de Wilhelm Schmid. Reste Officine Panerai, Maison d’origine florentine placée depuis 2000 sous la direction d’Angelo Bonati, 66 ans, qui devrait être la prochaine concernée par une passation de pouvoir.

Johann Rupert, président du groupe Richemont © Richemont
Je reste, moi non plus

Les vents contraires soufflant sur la profession depuis 18 mois sont-ils à la base de ce vaste brassage des cartes ? Après une ère d’euphorie au lendemain de la crise des subprimes, il est évident que les revers conjoncturels ont révélé de graves problèmes de surproduction dans la branche et probablement aussi un manque flagrant d’anticipation quant aux changements en cours dans l’univers du luxe. Faut-il dès lors s’étonner que les deux Maisons Vacheron Constantin et Piaget, elles qui ont procédé à quelque 200 licenciements fin 2016 après la centaine de postes biffés chez Cartier au printemps, fassent partie de celles qui prennent un nouveau départ avec un nouveau dirigeant ? Au terme d’un premier semestre clos fin septembre qui s’était soldé par un bénéfice opérationnel en forte baisse de 43 % à € 800 millions, dû notamment à des rachats de stocks pour 250 millions, Johann Rupert, Président et actionnaire de référence de Richemont, avait jugé ces résultats financiers « inacceptables ». Cet avertissement a-t-il porté ses fruits ? Après un recul du chiffre d’affaires de 13 % sur six mois, Richemont redressait la barre au troisième trimestre clos à fin décembre 2016 avec des ventes en hausse de 6 %. Un redressement, il est vrai, porté surtout par les Maisons joaillières du Groupe, dont Cartier.

Bulgari est en pleine forme, TAG Heuer gagne des parts de marché, Hublot signe la meilleure année de son histoire et Chaumet poursuit sa montée en gamme.

De son côté, LVMH ne fait preuve d’aucune contre-performance, bien au contraire, pour avoir enregistré des résultats records en 2016 avec des ventes et un bénéfice opérationnel en croissance de 6 % à respectivement € 37,6 milliards et € 7 milliards. « Toutes les activités, hormis la Distribution sélective, ont contribué à cette performance », précise LVMH. Parmi elles, les Montres et Joaillerie, qui ont vu leur chiffre d’affaires progresser de 5 % à € 3,468 milliards pour un bénéfice opérationnel de 458 millions (+ 6 %). En d’autres termes, Bulgari est en pleine forme, TAG Heuer gagne des parts de marché, Hublot signe la meilleure année de son histoire et Chaumet poursuit sa montée en gamme. Un panorama plutôt flatteur, hormis Zenith, qui n’est évidemment pas mentionné dans cette revue de détail. Et pour cause, la manufacture du Locle peine à trouver ses marques. Des atermoiements qui ont, là aussi, coûté son poste à Aldo Magada, nommé il y a deux ans et demi à la tête de la Maison par son « ami » Jean-Claude Biver, en charge de Zenith, Hublot et TAG Heuer pour LVMH. Pour lui succéder, le maestro Biver en personne relevait le gant !

Jean-Claude Biver
Lame de fond en vue

Au sein de Swatch Group, qui vient d’annoncer un chiffre d’affaires net 2016 en baisse de 10,6 % à CHF 7,55 milliards pour un résultat opérationnel de CHF 805 millions (– 44,5 %), pas d’opération guillotine toutefois. « Chez Swatch Group, si des résultats sont moins bons pour certaines marques, nous essayons de voir comment le Groupe peut les aider alors qu’ailleurs on a parfois l’impression que le bénéfice à court terme compte davantage », exposait Nick Hayek, patron du Groupe, au lendemain de la publication des comptes 2016. Il n’est pas davantage question de toucher à l’emploi : « Nous voyons bien que l’attrait pour les montres suisses dans le monde est intact, poursuivait-il. Je reçois même déjà des appels de marques tierces qui veulent de nouveau commander plus de mouvements et de composants. Dans trois mois, vous verrez, nos clients vont rouspéter, car ils n’auront pas assez de livraisons. Certes, notre bénéfice a chuté, mais c’est uniquement à cause de nos charges opérationnelles. Alors oui, nous paierons un peu moins de dividendes et nous allons réduire les bonus, mais nous n’allons pas toucher à l’emploi. »

Nick Hayek

Une philosophie qui mérite d’être soulignée, car si l’on en croit Manuel Emch, patron de RJ-Romain Jerome, « l’actuelle crise doit faire réfléchir. Il y a une véritable lame de fond qui va bouleverser tout ce à quoi on s’est habitué ces dernières années. Les modes de consommation vont changer, les clients ne veulent plus posséder, mais emprunter, l’instabilité permanente accélère absolument toutes les tendances. Et l’horlogerie suisse sera évidemment touchée par ces bouleversements. C’est même toute son organisation fondamentale qui devrait changer. Peu de marques ont actuellement les moyens de relever ce défi. » Des déclarations faites au moment où Emmanuel Emch annonçait son départ de la direction de RJ-Romain Jerome pour intégrer son conseil d’administration. Le défi reste intact.

Manuel Emch, CEO de Romain Jérôme
Manuel Emch
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