Noyée, si l’on peut dire, au sein des quelque 750 exposants du Salon de la sous-traitance horlogère EPHJ qui s’est tenu en juin dernier à Genève, une manifestation qui prend une ampleur sans précédent, la société Geneva Time Made Industrial (GMTI) venait parfaitement illustrer l’enquête réalisée pour l’occasion sur la pénurie de main-d’œuvre dans la profession. Et pour cause, GMTI travaille en étroite collaboration avec le secteur Horlogerie de la Fondation pour la formation des adultes de Genève (Ifage), auprès de qui elle recrute ses futurs opérateurs AFP (Attestation Fédérale de Formation professionnelle) les plus prometteurs pour leur offrir un tremplin professionnel auprès des marques en contact avec la société, voire les engager.
Intégration progressive des métiers
Car GMTI a le vent en poupe. Créée à Genève en 2011 par Nicolas Commergnat et Sébastien Billières, l’entreprise a connu une croissance fulgurante. Question de compétences probablement que réunissent ces deux horlogers qui ont fait leurs premières armes dans la restauration et la prototypie auprès de Svend Andersen, cofondateur de l’Académie horlogère des créateurs indépendants. « Nous nous sommes rapidement rendu compte que nous nous complétions très bien, explique Nicolas Commergnat. Ce qui nous a incités à fonder une première société nommée Alliance Genève, dédiée à la conception, production de mécanismes horlogers et restauration de pièces compliquées. Dans la foulée, nous avons posé les premiers jalons de notre démarche industrielle en lançant GMTI. »
Geneva Made Time Industrial
Dans un premier temps, GMTI a ainsi développé des activités d’emboîtage et de conditionnement pour ensuite passer à l’assemblage, sans oublier, en parallèle, une montée en puissance dans la décoration via des traitements galvaniques/chimiques originaux et, cerise sur le gâteau, la création de calibres originaux. Chaumet, pour prendre un seul exemple, doit au duo de sociétés le mécanisme de son « Attrape-moi… si tu m’aimes », soit un nouveau mouvement horloger où les aiguilles sont remplacées par deux des animaux totems de la marque, une araignée et une abeille mobiles qui se poursuivent sans cesse. Idem en ce qui concerne la récente marque horlogère genevoise Émile Chouriet, pour qui les nouveaux venus ont développé un tourbillon et une grande phase de lune.
De la complication au calibre de base
« Je dois avouer que nous avons de la peine à suivre la demande, poursuit Nicolas Commergnat. Mais nous sommes toujours à l’affût de nouveaux mandats. En effet, notre infrastructure nous permet de conduire divers projets de leur conception à la production avec le suivi d’un personnel formé et qualifié sur le produit. À l’heure actuelle, nous comptons une vingtaine de collaborateurs. Cela équivaut à une production d’environ 30’000 pièces par an, avec la possibilité de nous agrandir sur place. Nous avons en effet prévu des ateliers permettant d’accueillir jusqu’à 60 opérateurs horlogers. » Une évolution pas si utopiste, tant s’en faut. Mais si l’entreprise a d’emblée placé la barre très haut, en quelque sorte tout reste à faire. « Nous avons débuté avec des calibres de haute complication pour ingérer compréhension et savoir-faire, commente Nicolas Commergnat. Mais en gardant à l’esprit un grand principe, celui de travailler avec des partenaires locaux pour tout ce qui concerne la production de composants qui sortent de notre domaine de compétence. D’où notre nom d’Alliance Genève, une alliance des savoir-faire genevois. »
Cette démarche débouche aujourd’hui sur un travail de longue haleine consistant à développer et réaliser deux calibres de base (12.5 et 8.75 lignes) à la fois pour des collections homme et femme. Le projet de ces nouveaux tracteurs est à l’état de présérie avec comme objectif de proposer des mouvements fiables, parfaitement adaptés à une industrialisation en gros volumes et capables d’accepter des modules additionnels en termes de complication, soit une alternative aux Maisons établies. Un composant essentiel vient-il à manquer, comme le spiral ? Qu’à cela ne tienne, GMTI, avec ses partenaires, a trouvé une solution de production à même d’assurer la fabrication de ces précieux spiraux. À n’en pas douter, les ateliers de GMTI vont rapidement se peupler.