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Greubel Forsey, des horlogers aux méthodes d’orfèvre
Visite guidée

Greubel Forsey, des horlogers aux méthodes d’orfèvre

mardi, 11 décembre 2018
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Christophe Roulet
Rédacteur en chef, HH Journal

“Vouloir est la clé du savoir.”

« Une trentaine d’années passées dans les travées du journalisme, voilà un puissant stimulant pour en découvrir toujours davantage. »

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6 min de lecture

Chez Greubel Forsey, on ne produit pas des montres, on crée des garde-temps qui, pièce après pièce, reconstruisent le savoir horloger. Celui qui s’est perdu dans les limbes de la crise du quartz. Visite.

Si une Maison devait se résumer en quelques chiffres, ceux mis en avant par Greubel Forsey valent de longs discours. Depuis sa création en 2004, l’entreprise horlogère a conçu 22 calibres compliqués dont 8 sont en production. À la manœuvre, 115 collaborateurs, dont 22 dans l’atelier de décoration, pour un volume d’une centaine de pièces par an. À ce jour, 1’385 montres Greubel Forsey ont trouvé preneur, essentiellement des collectionneurs qui sont au nombre de 500 à 800 à rencontrer individuellement les dirigeants de la Maison lors de leurs visites annuelles des marchés. Une image se dégage ? Assurément pas celle d’une usine à tocantes. Un petit détour par Le Crêt-du-Locle, à une encablure de La Chaux-de-Fonds, pour visiter l’atelier – on ne dit pas « manufacture » dans le jargon Greubel Forsey –, suffit pour se rendre compte de la démarche. Dans un bâtiment qui semble littéralement sortir de terre en position oblique, on comprend très vite que les maîtres de céans ont calqué l’architecture des lieux sur leur façon de concevoir la mesure du temps, en un mot «jautrement ».

Des montres précises et fiables

« Quand nous avons lancé Greubel Forsey, on passait pour des extraterrestres, explique Stephen Forsey le sourire aux lèvres. Pensez donc ! Nous étions en plein développement de montres compliquées en sachant que nous allions limiter le nombre de chacun des modèles par respect pour nos clients. Nos trois premières Invention Pieces par exemple, à savoir le Double Tourbillon 30°, le Quadruple Tourbillon et le Tourbillon 24 Secondes, sont ainsi déjà archivées. » Pas question en effet pour Greubel Forsey de céder à la facilité. « La raison d’être de notre Maison est de reconstruire les savoirs, poursuit Stephen Forsey. Avec la crise du quartz, qui a perduré jusqu’au début des années 1980, on peut dire que la R&D dans l’univers de la montre mécanique s’est pratiquement arrêtée. Avec nos équipes, nous avons décidé, Robert Greubel et moi-même, que ce n’était pas une fatalité et que dans ce domaine on pouvait encore progresser. Comment peut-on prétendre que l’on n’obtiendra jamais la précision d’une montre électronique avec un calibre mécanique ? Qu’est-ce qui justifie un pareil jugement ? Chacun de nos mouvements est un élément de réponse à cette question. »

Comment peut-on prétendre qu’un calibre mécanique ne sera jamais aussi précis qu’une montre électronique ?
Stephen Forsey

Avec des écarts de marche compris entre – 1 et + 2 secondes par jour, en sachant que l’étalon en la matière est toujours posé par les – 4/+ 6 secondes du COSC, autant dire que les garde-temps Greubel Forsey ont déjà franchi un seuil dont très peu de manufactures se sont même approchées. Le Double Tourbillon 30° Technique n’a-t-il pas remporté la palme de sa catégorie lors du Concours international de chronométrie 2011 ? Et chez Greubel Forsey, qui dit « précision » dit aussi « fiabilité remarquable ». Sur l’ensemble de ses créations, la Maison enregistre à ce jour un taux de retour en service après-vente inférieur à 3 %. Quelques exemples pris au fil de la visite de l’atelier montrent d’ailleurs à quel point Greubel Forsey ne laisse rien au hasard. À commencer par les… vis. S’il faut compter un temps d’usinage de 10 à 15 secondes pour une vis industrielle courante, celles produites au sein de la Maison demandent entre 3 et 4 minutes chacune pour un résultat à l’avenant. « Nous avons bien essayé de mettre en valeur le fruit de ce travail, commente Stephen Forsey. Mais rien à faire, nos vis, aussi parfaites soient-elles, ne captent pas la lumière pour un rendu photographique que l’on aurait pu espérer. »

Le client, meilleur ambassadeur

Qu’à cela ne tienne. Le travail de l’ombre est un art parfaitement assumé chez Greubel Forsey, notamment en termes de décoration, si l’on songe que les moindres recoins des calibres maison passent en effet par les mains expertes des collaborateurs, sans être tous visibles pour autant. Centre névralgique de la Maison, au même titre que le bureau d’étude, pourrait-on dire, l’atelier de décoration dicte le tempo chez Greubel Forsey. Ne pénètre d’ailleurs pas qui veut dans le saint des saints. Comme il n’existe pratiquement pas de cursus en la matière, tout au plus des cours d’initiation pour professionnels en phase de reconversion, Greubel Forsey assure la formation et calcule au bas mot six ans pour qu’un collaborateur actif au sein de l’atelier ait toute la polyvalence voulue. En fonction des volumes de production de la Maison, il aura l’équivalent de 4,5 montres par an à décorer !

Greubel Forsey calcule six ans pour qu’un collaborateur actif au sein de l’atelier de décoration ait toute la polyvalence voulue.

On est clairement dans le tempo adagiosissimo, qui règle également le modus vivendi des horlogers en charge du montage des pièces. Chez Greubel Forsey, une fois les composants décorés, les montres sont assemblées, réglées et testées une première fois, avant d’être complètement désossées pour qu’un second assemblage termine le « grand œuvre ». Une Grande Sonnerie et ses 935 composants demande au minimum trois mois de travail, six semaines pour une Quadruple Tourbillon. Les huit Grande Sonnerie produites cette année auront ainsi mobilisé quatre horlogers pratiquement à plein temps. « Ce double assemblage, qui, chez nous, est réalisé par un seul et même horloger pour chacune des montres, est la seule manière de régler tous les petits problèmes qui peuvent se présenter », explique Stephen Forsey. On comprendra aisément que de tels processus méritent des explications, d’autant que les garde-temps de la Maison sont d’une rare technicité. Le contact client, via les 40 points de vente de la marque – les ambassadeurs, dans le jargon Greubel Forsey –, est ainsi essentiel dans la démarche commerciale qui fonctionne sur quatre principes de base : pas de consigne, pas de stocks, pas de travail à la commande, sauf pour des pièces uniques, et jamais de rabais. Le reste est affaire de relations humaines. Car comme le souligne Stephen Forsey, la marque a bel et bien ses propres ambassadeurs, mais il faut qu’ils achètent leur montre d’abord !

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