Nous sommes en présence d’un intello ! Ce qui, j’en conviens, ne devait pas courir les saloons et les vastes plaines à cette époque. (rires) John Morris est un prétentieux, un mec cultivé, certes, mais un mec qui a un ego stratosphérique. Dans le Wild West, il dénote, c’est clair. Quand Jacques m’a confié ce rôle, il m’a tout de suite fait comprendre qu’il ne fallait pas non plus que je parle comme un lettré du XIXe siècle. Nous avons donc réadapté certaines expressions que nous avons modernisées. Il nous a aussi fallu trouver le bon ton et les mots qui feraient marrer les autres personnages quand John s’exprime. Ce type est vraiment un spécimen dans son genre. Pour la petite histoire, Jacques, un Français, comme vous le savez, s’est entouré d’une équipe elle aussi française pour tourner Les Frères Sisters. Sur le set, tout le monde parlait français. Du coup, quand j’essayais de sortir quelques mots dans votre langue, j’avais vraiment le sentiment d’être John Morris en personne.
PEUR-PAI-TOUI-TAI, par exemple (perpétuité, ndlr). Désolé, je n’y arrive toujours pas. J’avais beau le dire et le redire, je m’enfonçais toujours davantage. Il y en a eu d’autres évidemment, mais je ne m’en souviens plus. C’est d’ailleurs bien mieux comme ça. Cela m’évite de les écorcher à nouveau.
Tout se joue sur la notion de temps. Quand vous tournez un film avec des équipes américaines, il faut que ça aille vite, car on pense souvent en termes de rendement et d’argent. Bref, les types de la prod sont toujours en train de regarder leur montre. Jacques, lui, il aime créer un espace de réflexion ou plutôt de méditation. Du coup, il m’est arrivé d’attendre plusieurs heures sur un rocher, sous un arbre ou les pieds dans l’eau d’une rivière avant que Jacques me donne le « go » pour tourner ma prochaine scène. Franchement, quand nous tournions en Espagne, je n’avais pas l’impression de travailler mais plutôt d’être en vacances. Ce que j’aime chez Audiard, c’est qu’il laisse la pâte reposer. Il ne la pétrit pas tout de suite. Maintenant, je ne pense pas qu’il soit très constructif d’opposer les cinéastes européens aux cinéastes américains. Ce sont deux approches différentes mais, au final, un seul désir : faire passer au public un bon moment, lui raconter une histoire.
J’ai été approché par Cartier pour être l’ambassadeur de la mythique montre Santos. D’ordinaire, dès qu’il s’agit de faire de la promo pour une marque, je suis un peu hésitant. Mais Cartier, c’est différent. Pourquoi ? Parce que c’est une incroyable compagnie avec une incroyable histoire. Au départ, pour être franc, je n’ai pas trop compris pourquoi on faisait appel à moi. Et puis, en tournant cette campagne pour eux, j’ai découvert les raisons. La montre Santos a été créée par Louis Cartier en 1904 pour son ami l’aviateur brésilien Alberto Santos-Dumont. Un pionnier de l’aviation. Ce dernier voulait une montre au poignet pour pouvoir lire l’heure pendant qu’il était dans les airs. Ce que j’aime dans cette montre revisitée, c’est qu’elle est interchangeable. Vous pouvez changer les bracelets à votre guise. Au fond, c’est un peu comme le métier d’acteur, vous pouvez changer de look quand cela vous chante. Je suis en outre quelqu’un de très méticuleux, de très précis. La Santos est donc en quelque sorte un trait d’union entre cet aviateur déterminé, cet esprit scientifique, rationnel, cartésien, et mon côté créatif rigoureux. Sans oublier cette volonté de sortir des sentiers battus, cette envie d’explorer. Nous partageons aussi la même honnêteté et ce même moteur qui s’appelle le dépassement de soi. En plus, je dois dire que la Santos est une très belle montre.
Exactement. J’ai des exigences assez élevées envers moi-même et j’attends la même chose de la part d’une montre. Le fait de pouvoir changer de bracelets est aussi une variante qui fait sens à mes yeux. Je ne m’épanouis pas si je fais tout le temps la même chose. J’exècre les tâches répétitives et la routine. Bref, j’aime me renouveler.
Difficile d’oublier une telle expérience. Lorsque Bear Grylls, le présentateur de ce show extrême m’a fait cette proposition, les paparazzis ne me lâchaient pas d’une semelle. J’avais donc besoin de prendre de la distance, de changer d’air. L’idée de me rendre en Islande pour faire un trek était à mes yeux une superbe opportunité de me ressourcer. Mais surtout de semer ces violeurs de vie privée. Je les voyais mal me poursuivre jusqu’en Islande ! (rires) Sur place, j’ai été scotché par cette nature insolente et par le froid glacé. Au départ, les conditions climatiques étaient plutôt clémentes. Mais le temps s’est très vite dégradé. Avec Bear, nous avons vraiment morflé. Un jour, nous nous sommes retrouvés en pleine tempête avec des vents d’une puissance effrayante qui ont proprement retourné un jet privé à l’aéroport. Cette expérience à 2’111 mètres d’altitude restera comme l’une des plus marquantes de ma vie. L’une des plus palpitantes surtout. À un moment, je devais franchir un ravin via un câble tiré de part et d’autre de deux versants. La production m’avait mis une GoPro devant le nez pour filmer ma laborieuse progression. J’en menais pas large. Et pendant que je tirais péniblement avec mes bras, Bear hurlait : « Continue, Jaaaaake, continue ! Et surtout… ne regarde pas en bas ! » Facile à dire.
Le luxe, pour moi, c’est Cartier et le parfum Eternity de Calvin Klein. Dans un domaine différent, j’ai aussi développé une obsession pour les oreillers. Honnêtement, je trouve que l’on devrait s’intéresser plus souvent aux oreillers. J’en ai six sur mon lit et, dès que j’en ai l’occasion, j’adore me blottir dedans.
La première montre que j’ai eue, c’était une Swatch offerte par ma sœur. J’avais 5 ou 6 ans. Mais elle m’a été confisquée assez rapidement ! (rires) Aujourd’hui, je ne sais d’ailleurs plus où elle est. Mais si ma mémoire est bonne, elle était orange et rose. Ma sœur Maggie me l’avait achetée dans un magasin Swatch de Time Square. Je me rappelle qu’il y avait plein de monde dans la boutique et que je ne savais pas trop quel modèle choisir. J’avais l’embarras du choix. À une autre occasion, mon grand-père m’a donné une montre de l’armée suisse. Je venais juste de décrocher mon diplôme du lycée. Il voulait marquer le coup en gravant quelque chose dessus. Rien que pour moi. C’est à ce moment-là que je lui ai révélé mon rêve de devenir acteur. Sa réponse n’a pas tardé. Il m’a dit d’un air déçu : « Essaie plutôt de trouver un vrai job ! » Mais cela ne l’a pas empêché de me donner cette montre suisse très résistante, que j’ai gardée au poignet pendant des années. En attendant, si vous avez des indices pour retrouver ma Swatch, je suis preneur. C’est vrai, quoi, c’était ma toute première montre !
Si je n’avais pas fait ce métier, j’aurais certainement été paysagiste, cuisinier ou bien menuisier, parce que j’adore faire la cuisine et aussi construire des tables.