Après de longs moments de réflexion mêlant hésitation, impatience et excitation, vous vous décidez enfin à franchir le pas : cette montre de vos rêves, elle est à vous ! En ouvrant délicatement l’écrin, un pincement de cœur vous étreint, réminiscence d’une enfance choyée à la veille de Noël lorsque le barbu vêtu de rouge venait pour vous gâter une fois encore. Quand « votre précieux » s’unit enfin à votre poignet, l’émotion est alors à son comble. Et c’est tant mieux, vous venez de vivre cette expérience inoubliable qui transforme n’importe quel adulte en petit enfant, les yeux remplis d’étoiles. Certaines marques ont d’ailleurs bien compris l’effet « dévastateur » que le syndrome de Peter Pan peut avoir sur certains consommateurs. C’est pourquoi elles n’hésitent pas un instant à jouer de nostalgie pour ranimer la flamme du bambin qui sommeille en tout un chacun.
Le rappel de cet imaginaire candide représente la pierre angulaire du travail de Maximilian Büsser, qui puise volontiers dans ses souvenirs d’enfance pour proposer des garde-temps hors du commun. En effet, la HM6 avec son tourbillon entouré par quatre sphères aux extrémités du boîtier rappelle étrangement un vaisseau spatial qui atterrit sur Terre pour une visite de courtoisie. Si l’on porte maintenant son regard sur Destination Moon, la dernière cocréation entre MB&F et L’Epée 1839, la référence à la fusée de Tintin dans Objectif Lune est frappante. Tout comme le clin d’œil à la mission Apollo 11, qui a fait rêver toute une génération en 1969, avec ce petit cosmonaute détachable de l’horloge qui se prénomme Neil, comme Neil Armstrong, le premier homme sur la Lune.
De la Terre à la Lune
L’alunissage de 1969 n’est pas sans évoquer en chaque connaisseur de montre une autre référence bien connue, celle de la Speedmaster. Depuis plusieurs décennies, cette icône d’Omega a su conserver un design sobre et fidèle au modèle d’origine. L’imaginaire entourant ce modèle fait remonter tous les baby-boomers à ce jour du 21 juillet lorsque, les yeux rivés à leur écran de télévision, ils découvraient qu’un rêve peut devenir réalité. Le message est d’ailleurs suffisamment bien rodé pour faire de toute acquisition d’une Speedmaster un acte de pionnier.
Autre génération, autre produit télévisuel ayant marqué de son empreinte le monde horloger : l’univers de fiction des Transformers, ces dessins animés du samedi matin regardés avec assiduité, souvent accompagnés d’un bol de céréales chocolatées. Sur l’écran, on admirait alors avec émerveillement ces voitures se transformer en robots gigantesques pour sauver le monde. Optimus Prime, le leader de ces super-héros venus d’ailleurs, a ainsi inspiré Urwerk pour son UR-T8, une montre métamorphosable présentée au SIHH 2017. À l’aide d’un petit bouton qu’il suffit d’actionner, la montre se retourne pour se parer d’un « bouclier » en titane hérissé de piques en guise de protection contre l’envahisseur.
Nombre de marques se plaisent à titiller la naïveté juvénile. Dans ce registre, impossible de ne pas citer Romain Jerome, qui joue avec brio sur tous les registres d’un imaginaire ludique ou fantastique dans la quasi-totalité de ses collections, Jaeger-LeCoultre avec sa Reverso « spécial Batman » ou encore Hautlence avec la Pinball.
Les montres de Haute Horlogerie sont souvent associées à un univers empreint de classicisme dans lequel évoluent des aristocrates en monocle lors de soirées mondaines. Ce cliché, on ne peut plus éloigné de la réalité, cède aujourd’hui sa place à des créations destinées à l’enfant qu’il ne faudrait jamais cesser d’être.