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Actualités

« La crise est en train de sauver l’horlogerie suisse »

mercredi, 20 mai 2009
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Christophe Roulet
Rédacteur en chef, HH Journal

“Vouloir est la clé du savoir.”

« Une trentaine d’années passées dans les travées du journalisme, voilà un puissant stimulant pour en découvrir toujours davantage. »

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6 min de lecture

Pour Henri-Michel Guignard, ingénieur et constructeur horloger à la tête de Coredem, bureau d’étude, de recherche et de développement, la qualité des produits mécaniques n’est pas à la hauteur des prix exigés sur les marchés de détail. La crise actuelle va changer la donne.

Henri-Michel Guignard fait assurément partie de ces hommes de l’ombre de l’horlogerie suisse, ces spécialistes indispensables de la micromécanique que les marques se gardent bien de sortir de leur antre, de peur de perdre la paternité des innovations qu’elles présentent à grands renforts d’autocongratulation. « Mais n’oublions pas que c’est au plus profond des ténèbres que s’ourdissent les meilleurs complots », aime à plaisanter ce constructeur à la tête de Coredem, bureau d’étude, de recherche et développement en chronométrie horlogère. Pour preuve, parmi les cinq clients de la société qu’il a fondée en 2004, seul l’un d’entre eux, à savoir De Béthune, consent à être cité.

Et pour cause. Le département « nouvelles technologies » de la manufacture s’est penché, en collaboration avec Henri-Michel Guignard entre autres, sur l’étude du silicium, atome candidat parfait pour l’horlogerie grâce à sa structure monocristalline d’une extrême légèreté mais d’une grande dureté qui ne se déforme pas et permet une précision de l’ordre du micron. De ces recherches sont nés un spiral en silicium, un balancier en silicium avec bilames de compensation thermique et masselottes en platine, un balancier annulaire, centre en silicium dans un anneau en platine, et un tourbillon à cage mono-bras conçue en silicium et titane.

25 brevets en trois ans

Mais pour le reste, la discrétion est de mise. Seule composant « visible » sur son ordinateur : un nouveau concept d’ancre en titane monobloc « breveté » ayant la particularité d’avoir son centre de masse exactement sur son axe de rotation. Une ancre qui sera intégrée dans l’une des nouveautés prévues pour le prochain Baselworld. Mais par qui ? Encore une fois, le secret reste bien gardé. Ce qui n’empêche pas Henri-Michel Guignard de poursuivre son bonhomme de chemin qui l’a déjà conduit à déposer 25 brevets, à la fois pour le compte de Coredem ou de ses clients. A l’heure actuelle, le constructeur travaille essentiellement sur le tourbillon, en prédisant une mutation profonde de l’horlogerie mécanique vers ce type de complication grâce, notamment, au fruit d’une nouvelle percée qu’il prépare. Laquelle ? C’est certainement du côté des brevets déposés que se trouvent les premiers éléments de réponse.

Jaeger-LeCoultre est une des manufactures les plus authentiques qui existent.
Henri-Michel Guignard

Henri-Michel Guignard visionnaire ? Vu son parcours professionnel force est de lui accorder toute la crédibilité voulue. Après son diplôme d’horloger obtenu à l’Ecole technique de la Vallée de Joux, complété d’un diplôme d’ingénieur ETS en micromécanique, il entame sa carrière auprès de Jaeger-LeCoultre où il restera dix ans, d’abord comme constructeur pour ensuite prendre successivement la tête des Département Fabrication de mouvements et Méthode et Outillage. « Jaeger-LeCoultre est une des manufactures les plus authentiques qui existent. C’était tout simplement le meilleur de ce à quoi un jeune constructeur pouvait prétendre, commente-t-il aujourd’hui. Une simple petite anecdote : je me rappelle qu’à l’époque, nous avions à disposition 1200 plans de vis différentes, des vis originales pour chaque nouveau calibre. »

Une expérience exceptionnelle

Poussé par la crise des années 70 et l’appel du Sud, Henri-Michel Guignard quitte toutefois « Sa Vallée » pour reprendre un commerce de bijouterie-horlogerie à Montélimar qu’il exploitera pendant quinze ans. Mais l’appel des sapins est plus fort. Il revient ainsi sur ses terres d’origine comme responsable du Département montage de mouvements chez Frédéric Piguet puis comme directeur de production chez Breguet. A chaque fois, le rachat de ces entités pousse Henri-Michel Guignard à explorer d’autres voies et notamment celle de l’indépendance avec Coredem. Pas entièrement toutefois puisqu’entre 2002 et 2006, il va encore participer au développement de Technotime comme directeur général mandaté, avant que le milliardaire chinois Charles Chong (Chung Nam Watch), actionnaire existant, reprenne la société en 2006.

Qu’à cela ne tienne, sa société Coredem SA est désormais opérationnelle et ce ne sont pas les idées qui manquent, tant s’en faut. Non sans une certaine nostalgie pour l’horlogerie des « anciens », celle qui est en train d’être sacrifiée sur l’autel de la rentabilité et du profit immédiat. « Au niveau de la formation, les ingénieurs qui sortent des écoles manquent de compétences pour n’avoir pas assez manipulé de montres, précise Henri-Michel Guignard. Au niveau de la production, la qualité des produits mécaniques souffre d’un besoin chronique d’amélioration si bien qu’ils ne sont certainement pas à la hauteur des prix pratiqués actuellement sur les marchés de détail. Et je préfère ne pas m’étendre sur le COSC, usurpé aujourd’hui comme un argument de vente. En ce sens, on ne peut que saluer les travaux effectué sur la lubrification des montres, notamment chez Jaeger-LeCoultre et Ulysse Nardin. Ce type de recherche, c’est l’avenir ». Et Henri-Michel Guignard de conclure : « d’une manière générale, je pense que la crise financière est en train de sauver l’horlogerie suisse ! En effet, la surchauffe de ces dernières années nous amenait « droit dans le mur ». La croissance que nous avons vécue était démesurée. Nos entrepreneurs horlogers sauront-ils profiter de cette accalmie pour choisir une trajectoire plus cohérente ? Il reste juste à espérer qu’ils n’oublieront pas ce qui a fait leur succès jusqu’ici : de bons professionnels ! »

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