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La lutte contre le magnétisme s’organise
Modes & Tendances

La lutte contre le magnétisme s’organise

lundi, 23 septembre 2019
Par Flavia Giovannelli
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Flavia Giovannelli

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9 min de lecture

L’exposition toujours plus fréquente aux champs magnétiques n’est pas sans effets sur la bonne marche des montres. Si les efforts des marques face à ce problème ne datent pas d’hier, ils débouchent aujourd’hui sur des résultats prometteurs. Tout comme les nouveaux outils de démagnétisation.

Généralement, tout commence par un garde-temps qui s’emballe, un peu, beaucoup, follement. D’abord de 60 secondes par jour, puis le décalage augmente. Potentiellement, c’est le signe qu’un mouvement subit les conséquences d’une exposition à des champs magnétiques. Et comme chacun le sait, ceux-ci sont toujours plus nombreux dans nos vies. Les aimants de certains jeux pour enfants, les couvercles d’iPad, les portiques de sécurité des aéroports, les pianos de cuisson à induction… Tous ces objets peuvent être la cause de tels dérèglements du fait de leur rayonnement magnétique qui se mesure en gauss. Un petit aimant, par exemple, dégage une intensité de 2’000 à 4’000 gauss, contre 15’000 gauss pour un appareil d’imagerie par résonance magnétique (IRM) dans un hôpital. Rassurons tout de suite les plus inquiets : non, les ondes électromagnétiques de la 5G n’auront aucune incidence sur les mécanismes horlogers étant donné leur trop haute fréquence.

Quoi qu’il en soit, le risque est fréquent. Lorsqu’un garde-temps prend trop d’avance, il convient donc de vérifier en premier lieu si son cœur n’a pas été magnétisé. Le diagnostic s’effectue par un horloger qui se chargera de corriger le défaut. Rien de plus facile : avec le bon équipement, l’opération s’effectue en moins de deux minutes. Mais la mésaventure n’en est pas moins source de tracas pour le client, qui peut craindre une défaillance technique plus grave. Or plus le prix est élevé et la montre récente, moins son propriétaire comprend ce qui se passe, surtout si son « petit bijou » reprend le chemin de la manufacture qui l’a produit. En résumé, ce simple problème de magnétisation devient un facteur d’engorgement des services après-vente.

Premiers jalons dans les années 1950

Pour toutes ces raisons, les acteurs horlogers ont beaucoup investi dans la recherche, histoire d’éradiquer, ou tout au moins de diminuer le nombre de cas de magnétisation. Sur le plan technique, rappelons que, parmi tous les composants, c’est essentiellement le spiral, organe de régulation du mouvement avec son balancier, qui est l’objet de toutes les préoccupations. Si l’isochronisme du régulateur est perturbé pour des défauts d’équilibre, d’ajustement ou pour des problèmes liés aux champs magnétiques, c’est tout le mouvement qui en pâtit en termes de précision. Raison pour laquelle les récents efforts des équipes de R&D ont porté surtout sur la production de spiraux amagnétiques ou paramagnétiques.

La question de la magnétisation est revenue en force avec le boum de l’horlogerie mécanique dès les années 2000.

Mais la démarche ne date pas d’hier. À partir du moment où les horlogers ont commencé à rivaliser sur la prévision extrême de leurs mouvements mécaniques, ils se sont souciés des effets du magnétisme. La commercialisation de l’Oyster Perpetual Milgauss par Rolex en 1956, celle de l’Ingenieur par IWC un an plus tôt ou encore la Railmaster d’Omega datant de 1957 – toutes des montres professionnelles – représentent les premiers jalons dans cette quête de solutions pour lutter contre les champs magnétiques via un « caisson » isolant interne au boîtier. Et si la question a été provisoirement reléguée au second plan quelques décennies durant, elle est revenue en force avec le boum de l’horlogerie mécanique dès les années 2000 et la prolifération des champs magnétiques dans la vie quotidienne.

Calibre 3255 © Rolex
Calibre 3255 © Rolex

En collaboration avec le Centre suisse d’électronique et de microtechnique à Neuchâtel (CSEM), un consortium formé par Rolex, Patek Philippe et Swatch Group a très vite planché sur le développement de composants en silicium, un matériau alors révolutionnaire en horlogerie, totalement insensible aux champs magnétiques, pour lequel il faut relever le rôle d’Ulysse Nardin en tant que pionnier dans ce domaine. En 2006, Patek Philippe dévoilait ainsi son Spiromax, soit un spiral en silicium. La même année, Breguet faisait de même. Du côté de Rolex, en 2005, après cinq années de recherche, la Maison présentait d’abord son spiral bleu nommé Parachrom, « un nouvel alliage paramagnétique, totalement insensible aux champs magnétiques et jusqu’à dix fois plus résistant aux chocs », précise la Maison, qui présentera son premier spiral en silicium Syloxi en 2014.

Spiral Syloxi © Rolex
Spiral Syloxi © Rolex
La concurrence s’organise

Omega ne pouvait pas rester les bras croisés. Tout a commencé par l’intégration de l’échappement co-axial dans les mouvements ETA dédiés à la marque, donnant en 1999 le calibre 2500, avant qu’un nouveau mouvement soit construit autour du désormais célèbre échappement mis au point par le génial horloger George Daniels pour donner le Calibre Co-Axial 8500 présenté en 2007. Nouvelle étape en 2013 avec le Calibre Co-Axial 8508 conçu pour la Seamaster Aquaterra résistant cette fois à des champs magnétiques de 15’000 gauss. Une réelle percée dans le domaine étant donné que la protection aux champs magnétiques d’une telle ampleur n’est plus assurée par un caisson interne en fer blanc mais bel et bien par le choix de matériaux non ferreux pour les composants du mouvement. Il ne restait plus au Swatch Group qu’à boucler la boucle en présentant fin 2014 une nouvelle certification établie conjointement avec l’Institut fédéral de métrologie suisse (METAS), qui est la plus contraignante en termes de résistance aux champs magnétiques avec la barre placée à 15’000 gauss. Depuis, Omega a entamé son grand œuvre consistant à équiper l’ensemble de sa production, Moon Watch excepté, de mouvements co-axiaux certifiés Master Chronometer, soit le label maison répondant aux critères du METAS, grâce notamment à des composants en silicium.

Début 2019, TAG Heuer présentait en première mondiale un spiral en composite de carbone.

L’an dernier, c’était encore au tour d’une autre enseigne de Swatch Group, en l’occurrence la marque Swatch, de présenter sa propre innovation réalisée conjointement avec Audemars Piguet, soit le Nivachron, un nouvel alliage utilisé pour le spiral. À base de titane, usinable selon la méthode classique du tréfilage, ce matériau est résistant aux champs magnétiques, aux variations de température, aux chocs et au vieillissement. Qui plus est, il est moins cher à produire que le silicium. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Début 2019 venait le tour de TAG Heuer de faire parler de lui avec, à la clé, une première mondiale sous la forme d’un spiral réalisé en composite de carbone, donc parfaitement amagnétique, intégré dans le calibre 5 certifié COSC des nouvelles Autavia Isograph.

Balancier spiral collection Autavia © TAG Heuer
Balancier spiral collection Autavia © TAG Heuer

S’il n’est pas possible de citer ici toutes les récentes percées dans le domaine, les experts sont prêts à parier que les nouvelles générations de mouvements permettront de s’affranchir des effets du magnétisme d’ici quelques années. Une nouvelle réjouissante qui s’accompagne également d’innovations importantes réalisées dans les appareils mis au point pour démagnétiser les mouvements mécaniques. La lutte se poursuit.


 

La solution H2i au magnétisme
Spécialisée dans le marché de l’instrumentation horlogère, H2i a été fondée en 2014 par deux ingénieurs, Emmanuel Baudet et Jean-Charles Rousset. Forts de leur expérience au sein d’une marque de Haute Horlogerie, ils décident de relever le défi lié à la magnétisation des montres. Leur idée : prendre le problème en amont, pour désengorger les services après-vente. H2i a ainsi mis au point un concept destiné aux boutiques multimarques et aux particuliers. « Il fallait développer un outil capable de contrôler la précision d’une montre mécanique et de la démagnétiser, le tout dans un boîtier deux en un », résume Jean-Charles Rousset. Sachant que ce qui est simple à concevoir est souvent complexe à réaliser, les deux ingénieurs de la jeune société ont passé de longues heures à imaginer, puis à prototyper cette innovation. Le but : permettre aux détaillants qui n’ont pas de formation particulière dans le domaine technique d’effectuer ces opérations pour désencombrer les services après-vente des manufactures.

Accuracy boutique edition WilliamL iPad © ONEOF
Accuracy boutique edition WilliamL iPad © ONEOF

Dans le cahier des charges, il fallait donc que l’outil soit petit et qu’il puisse fonctionner sans alimentation électrique. Le Oneof (prononcez à l’anglaise !) Accuracy Boutique Edition se présente donc comme un boîtier plutôt design qu’il suffit de brancher à un téléphone mobile ou à une tablette. Il suffit ensuite de presser sur un bouton et le tour est joué. À ce jour, plus de 500 points de vente des grandes marques horlogères suisses s’en sont équipées. En outre, H2i a pris un stand à Baselworld pour multiplier les contacts auprès d’une nouvelle cible de clients, à savoir les boutiques multimarques. « Nous avons été très satisfaits de l’accueil », résume Jean-Charles Rousset, qui sera également présent avec le Oneof au Salon EPHJ à Palexpo Genève du 18 au 21 juin prochain.

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