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L’horlogerie célèbre aussi les 100 ans du Bauhaus
Culture

L’horlogerie célèbre aussi les 100 ans du Bauhaus

mardi, 24 septembre 2019
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Christophe Roulet
Rédacteur en chef, HH Journal

“Vouloir est la clé du savoir.”

« Une trentaine d’années passées dans les travées du journalisme, voilà un puissant stimulant pour en découvrir toujours davantage. »

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7 min de lecture

Fondée en 1919 par Walter Gropius, la Staatliches Bauhaus, école des arts appliqués de Weimar, aura eu une influence inversement proportionnelle à sa courte existence. Fondés sur une vision moderniste du monde, ses préceptes ont traversé le siècle et marqué durablement le monde horloger.

Rigide, austère, froid pour les uns ; inspiré, visionnaire, stylé pour les autres. Le Bauhaus laisse rarement indifférent. Et pour cause, ce courant de pensée visionnaire a traversé le XXe siècle avec puissance, marquant de son empreinte le monde des arts et métiers qui en porte aujourd’hui encore les stigmates. Aussi, en cette année du 100e anniversaire marquant la naissance de la Staatliches Bauhaus à Weimar, les hommages rendus à cet institut émanent-ils de disciplines aussi variées que la photographie, l’architecture, les arts plastiques, le mobilier et… l’horlogerie.

À peine 14 ans d’histoire

Sans vouloir refaire l’histoire du Bauhaus, on retiendra que cette école professionnelle d’un genre nouveau a été fondée à Weimar en mars 1919 par l’architecte Walter Gropius. Durant ses 14 ans d’existence, marquée par deux déménagements, à Dessau dans des bâtiments flambant neufs d’abord, puis dans une ancienne usine de téléphones à Berlin, cette institution a réuni une palette de penseurs, artistes et créateurs qui se sont ingéniés à jeter les bases d’une nouvelle forme de vie sociale. Dans ce contexte, bien davantage qu’une « école », le Bauhaus aura été un formidable laboratoire de nouvelles expériences où toute forme d’utopie avait sa place. Et si on y a effectivement « enseigné » la poterie, la reliure, la menuiserie, le travail sur métal et textile mais aussi la peinture, la sculpture, le théâtre et la photographie, l’objectif était essentiellement de réconcilier artisanat et industrie en gommant la division entre art et technique.

Qualifiée par les nazis de « centre de subversion » vendu au « bolchévisme culturel », l’école se saborde en 1933.

La création de l’institut doit évidemment être replacée dans son contexte, à avoir celui d’une Allemagne exsangue au lendemain du premier conflit mondial. « Peut-être qu’en face de la misère économique notre tâche est de nous faire les pionniers de la simplicité, c’est-à-dire de trouver pour tout produit de nécessité vitale la forme simple adaptée à son usage et solide », déclarait l’artiste Oskar Schlemmer, professeur de peinture. Cette composante sociale a certainement guidé les recherches du Bauhaus vers la conception d’espaces et objets fonctionnels, à produire en série, dans un souci de rationalisation. Même constat au niveau du design, réduit à l’essentiel. C’en est fini des fioritures de l’Art déco et de l’obsession de la pièce rare et unique. L’heure est aux objets d’usage courant, adaptés aux conditions de production dans un souci de pureté des formes. D’où la fameuse règle d’or : la fonction dicte la forme. Las, l’atelier expérimental que fut le Bauhaus n’était pas fait pour plaire aux nazis. Qualifiée de « centre de subversion » vendu au « bolchévisme culturel », l’école se saborde en 1933.

Junghans et Max Bill

Les théories du Bauhaus ont assez vite trouvé un terrain d’application des plus propices en horlogerie. Quoi de plus naturel, quand on se fait une spécialité de produire des instruments conçus pour la vie de tous les jours que d’adopter une démarche allant à l’essentiel ? Dans cette optique, les cadrans sont dépouillés à l’extrême dans un souci de lisibilité, les aiguilles perdent toutes courbures inutiles, les boîtiers se font simples et faciles à usiner, les chiffres sont arabes, plus intuitifs que les romains, les index deviennent fins et droits. Quant au style, il naît de ce dépouillement extrême, un style Bauhaus reconnaissable entre tous car éminemment fonctionnel, d’où son étrange beauté. Dès les années 1920 et 1930 apparaissent ainsi les premiers cadrans arborant un tel design, réalisés par Weber & Baral, alors premier fabricant au monde. A. Lange & Söhne, établi à Glashütte, les adoptera pour un temps, comme en atteste un modèle de 1937, l’un des premiers garde-temps reconnus de style Bauhaus.

Faire des montres qui s’éloignent le plus possible de toute mode.
Max Bill

C’est toutefois la Maison Junghans, fondée en 1861 à Schramberg, dans le Bade-Wurtemberg, qui va donner ses lettres de noblesse au Bauhaus horloger, en s’associant dans les années 1950 avec l’artiste suisse Max Bill. Cet ancien élève de l’institut va d’abord signer une horloge de cuisine en 1956, puis une horloge de table deux ans plus tard, avant de réaliser en 1961 une première montre-bracelet qui va donner naissance à une collection devenue une véritable référence horlogère. Toutes ces créations répondent au même principe : « Faire des montres qui s’éloignent le plus possible de toute mode. Aussi intemporelles qui possible mais sans pour autant oublier le temps. »

Les marques allemandes en première ligne

Stowa, manufacture allemande fondée en 1927, fait également partie des Maisons qui ont très tôt été sensibles à ce type de design avec la présentation de ses premiers modèles de style Bauhaus en 1938 déjà. Style que l’on retrouve aujourd’hui avec la gamme Antea. De son côté, Junkers, société aéronautique allemande de premier plan établie à Dessau, avait travaillé en étroite collaboration avec les fondateurs du Bauhaus pour la conception de logements dont la société avait cruellement besoin en tant que premier employeur de la région en plein essor. Lorsque Junkers a commencé à se développer dans l’horlogerie à la fin des années 1990, elle s’est bien évidemment rappelé cet épisode de son histoire dont une collection actuelle se fait l’écho.

Klassik KS Silver © Stowa
Klassik KS Silver © Stowa

Cette source d’inspiration est également des plus palpables chez Nomos, société fondée à Glashütte en 1990 dont la gamme Tangente s’est très vite imposée auprès des amateurs du genre. Cette collection n’est d’ailleurs pas la seule à s’inspirer du Bauhaus. La quasi-totalité des montres Nomos répondent en effet à un design minimaliste où le dépouillement est source d’une démarche esthétique des plus abouties. La liste s’arrête-t-elle avec Nomos ? Certainement pas : en terre allemande on notera encore Braun, Laco, Defakto, Aristo ou encore MeisterSinger, qui, tous, perpétuent la tradition du Bauhaus, tout comme Skagen, filiale de Fossil, qui cultive un design d’inspiration danoise, ou encore Uniform Wares à Londres, qui équipe ses garde-temps de mouvements suisses. Il n’en reste pas moins que peu de Maisons, hors celles de tradition germanique, revendiquent cet héritage avec autant de force. Et c’est parfaitement compréhensible. Né dans une Allemagne en pleine remise en question, ce mouvement est intimement lié à une Weltanschauung propre à une culture qui en a fait un symbole. Cent ans plus tard, c’est encore vrai, montres anniversaires à l’appui.

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