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Micro5, un premier pas vers la micro-usine ?
Actualités

Micro5, un premier pas vers la micro-usine ?

mardi, 5 juillet 2016
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Fabrice Eschmann
Journaliste indépendant

“Il faut se méfier des citations sur Internet !”

« Une grande histoire aux multiples auteurs : ainsi en est-il de la vie. Ainsi en va-t-il aussi de l’horlogerie. Sans rencontres, point d’histoire. »

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6 min de lecture

Dix fois moins d’énergie, dix fois moins de place pour une qualité équivalente, la micromachine à commande numérique imaginée par la HE-Arc Ingénierie a suscité un fort engouement au salon de la sous-traitance EPHJ de Genève. Les perspectives en termes d’écologie sont énormes.

Le concept est tellement évident que l’on se demande bien pourquoi on n’y a pas pensé plus tôt. Présentée en première mondiale au salon des moyens de production microtechniques Siams en avril dernier, puis à nouveau au salon EPHJ, où elle a remporté le Prix Spécial du Jury, la Micro5 a suscité l’étonnement aussi bien que l’engouement partout où elle était en démonstration. Car là où ses grandes sœurs font la taille d’une voiture et pèsent plusieurs tonnes, cette CNC 5 axes n’est pas plus grande qu’une machine à café de 35 kg. Développé par la HE-Arc Ingénierie, ce prototype s’inscrit à la croisée des notions d’Industrie 4.0 et de Microfactory au sein desquelles les aspects environnementaux prennent une place prépondérante.

Il était temps d’adapter la taille de la CNC à celle des objets fabriqués !
Claude Jeannerat
Comme une machine à café

« Sur une machine à commande numérique actuelle de plusieurs mètres cubes, seule 50 % de l’énergie consommée sert à faire des copeaux, souligne Claude Jeannerat. Le reste n’est que production de chaleur. Il était temps d’adapter la taille de la CNC à celle des objets fabriqués ! » Professeur à la HE-Arc Ingénierie, lui et son équipe se sont donc lancé un défi : créer une machine 5 axes capable d’usiner un cube de 50 mm d’arête en consommant un minimum de courant et ce, sans perte de qualité. Les premières études aboutissent ainsi au ratio optimal de 1:5 entre la dimension de la pièce à façonner et celle de la structure machine. Résultat : le prototype présenté au public est à peine plus grand qu’une machine à café et se contente de 500 W de puissance – sur une prise de 230 V –, contre 25 à 30 kW pour les mastodontes utilisés aujourd’hui.

Si la démarche paraît évidente face à l’augmentation des coûts de l’électricité et du prix du mètre carré, elle n’en a pas été simple pour autant. Pour parvenir à un état de surface de 50 à 100 nanomètres, il a fallu revoir certains détails : « Les algorithmes ont dû être recalculés, explique Claude Jeannerat. Sur une machine lourde, la broche effectue un mouvement de recul lorsqu’elle accélère. Il n’en est rien sur la Micro5. Nous avons donc dû nous adapter à sa taille et à son comportement. » Ici, la broche fixe tourne à la vitesse folle de 60 000 tours/minute sans produire beaucoup de chaleur et, donc, sans nécessiter de lubrification. Les 5 axes d’usinage sont quant à eux assurés par la plate-forme accueillant le composant. « L’air ambiant suffit à maintenir cette station d’usinage miniature à sa température optimale de fonctionnement, poursuit le professeur. Et selon les simulations, cinq minutes suffisent pour qu’elle atteigne sa température de marche, alors qu’il faut plusieurs heures à une machine pesant plus d’une tonne. »

Avec nos coûts les plus élevés au monde, nous avons tout intérêt à être aussi les plus malins !
Philippe-Emmanuel Grize
La concurrence existe

Prometteur, ce projet a été développé dans le cadre du programme EcoSwissMade. Lancé par le domaine Ingénierie et Architecture de la Haute École spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO), celui-ci a pour ambition de réduire drastiquement la consommation d’énergie dans la production industrielle suisse, au niveau aussi bien de la construction des machines que de leur utilisation. Et les enjeux sont énormes : « L’un des objectifs est de maintenir en Suisse la fabrication de ces outils », relève Olivier Naef, responsable du domaine Ingénierie et Architecture de la HES-SO. Mais ce sont bien les économies d’énergie et de place qui concentrent les plus gros potentiels d’exploitation : « Notre micromachine est le premier pas vers des micro-usines, se réjouit Claude Jeannerat. Un développement qui ouvre la possibilité de réindustrialiser des zones périphériques et, partant, d’apporter une solution au trafic pendulaire. » Des perspectives que Philippe-Emmanuel Grize, directeur de la HE-Arc Ingénierie, résume par cette formule : « Avec nos coûts les plus élevés au monde, nous avons tout intérêt à être aussi les plus malins. »

Reste que la concurrence existe. Les méthodes de fabrication additives – la fusion sélective laser, le frittage sélectif ou encore la fusion par bombardement électronique –, si elles n’ont pas encore vraiment conquis l’industrie horlogère, se développent rapidement et suggèrent intrinsèquement les mêmes avantages. « Les procédés ablatifs, c’est-à-dire par enlèvement de matière, ont encore de l’avenir, estime Denis Jeannerat, directeur technique de la société Willemin-Macodel, qui a développé le prototype de la Micro5. Les avantages restent nombreux, comme la qualité de l’état de surface, les opérations de terminage et de polissage moins nombreuses ou encore la robustesse du processus. »

Si l’avenir paraît séduisant, la production de la Micro5 n’a pas encore commencé. En tant qu’institution publique, la HE-Arc Ingénierie n’a d’ailleurs pas vocation à fabriquer des machines. Mais l’engouement suscité par le projet a d’ores et déjà débouché sur un protocole de transfert technologique à destination des industriels intéressés. C’est l’Association de recherche communautaire des moyens de production microtechnique (ARCM) – anciennement TT-Novatech – qui en est chargée. En attendant, les étudiants de la HE-Arc en Conception ergonomique et Design n’en finissent pas d’imaginer des applications à la Micro5. Comme le concept S Alpha, une micromachine juchée sur un socle extrêmement compact, destinée aux indépendants ; ou l’idée de 9 machines interconnectées et autonomes, logées dans un meuble doté d’un bras distributeur robotisé. Et ce n’est qu’un début.

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