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lundi, 11 avril 2016
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Fabrice Eschmann
Journaliste indépendant

“Il faut se méfier des citations sur Internet !”

« Une grande histoire aux multiples auteurs : ainsi en est-il de la vie. Ainsi en va-t-il aussi de l’horlogerie. Sans rencontres, point d’histoire. »

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8 min de lecture

Les boîtiers saphir sont de plus en plus nombreux sur le marché. Richard Mille, pionnier en 2012, s’en est fait une spécialité. Mais la marque s’est fait rejoindre. Analyse d’un véritable phénomène.

Il y a 10 ans seulement, c’était encore mission impossible. Aucun sous-traitant, aucun spécialiste, même à l’étranger, n’avait la technologie et les compétences pour un tel projet. Ces derniers mois, c’est à qui présentera le premier sa création : Richard Mille – pionnier en la matière –, H. Moser & Cie, Rebellion, Hublot, MB&F… On ne compte plus les marques qui enrichissent leurs collections d’un modèle en saphir. Matière la plus dure après le diamant, extrêmement difficile à usiner, ce cristal synthétique a fait l’objet, depuis 2012, de développements considérables dans le domaine de l’horlogerie. Autrefois travaillé dans deux dimensions uniquement, il est aujourd’hui taillé dans la masse à l’aide de CNC 5 axes. De quoi doper la créativité des horlogers, dont certains n’hésitent pas à en repousser sans cesse les limites. Le saphir a été synthétisé pour la première fois en 1902 par le chimiste français Auguste Victor Louis Verneuil. C’est d’ailleurs son nom qui est associé au processus consistant à fondre l’oxyde d’aluminium à la flamme, à une température de plus de 2 000 °C. La « boule » ainsi obtenue sert à la fabrication de nombreux composants, utiles dans des domaines comme l’optique, le médical, l’aéronautique ou encore la microélectronique. Dans l’horlogerie, où la demande est la plus forte, cette matière première, qui prend plus la forme d’une carotte que d’une boule, est celle dans laquelle sont façonnés les verres de montre. Son extrême dureté (9 sur l’échelle de Mohs, qui compte 10 degrés), sa grande stabilité thermique et sa structure cristalline, qui lui confère un important pouvoir de transparence, en font le matériau idéal pour protéger le cadran, mais aussi pour découvrir le mouvement par le fond.

En 2012, Richard Mille a été le premier à se lancer avec le modèle RM 56, un tourbillon chronographe limité à 5 exemplaires.
Les projets fous de Richard Mille

Inconvénient du procédé Verneuil : le diamètre de la carotte, qui ne dépasse généralement pas 45 mm. Un écueil qui, ajouté au caractère cassant du saphir, explique que durant de longues années les spécialistes se sont limités à travailler la matière à plat. L’exode des commandes à l’étranger, où des fournisseurs proposent désormais un rapport qualité/prix imbattable, va donner un grand coup de pied dans la fourmilière. Une poignée de sociétés suisses se sont ainsi mises à développer des spécialités. Et pour ce faire, elles ont redécouvert une autre manière de fabriquer le saphir synthétique : le procédé Kyropoulos. Complètement fondu, le matériau de base est ici lentement refroidi, pour finir par former un lingot. Avantages : une dimension plus grande et l’homogénéité presque parfaite de la « boule ». Deux caractéristiques qui vont ouvrir la porte à des projets fous.

Richard Mille RM 56-01 Tourbillon Saphir
Richard Mille RM 56-01 Tourbillon Saphir

Richard Mille a été le premier à se lancer. Au Salon International de la Haute Horlogerie 2012, lorsqu’il présente le modèle RM 56, c’est le grand émoi. Limité à 5 exemplaires, ce tourbillon chronographe à rattrapante avec indicateurs de réserve de marche, de couple et de fonctions fait autant parler de lui pour son boîtier entièrement en saphir que pour son prix : CHF 1,9 million. Car la démarche, si elle est désormais possible, reste passablement onéreuse. Quatre années de recherche et de développement ont en effet été nécessaires à l’apprentissage de la taille du saphir en 3D. Tout a dû être repensé, des outils de coupe en diamant pour CNC au processus de polissage, extrêmement important pour une parfaite transparence. Une telle boîte, constituée de trois parties assemblées par des vis en titane, demande pas moins de 1 000 heures d’usinage, dont 430 de meulage et 350 de polissage.

Richard Mille RM 56-02
Richard Mille RM 56-02

À partir de là, Richard Mille ne s’arrêtera plus. L’année suivante, sa RM 56-01 Tourbillon Saphir arbore non seulement un boîtier transparent mais également la platine, la roue de petite moyenne et le pont de centre dans la même matière. En 2014, la RM 56-02 ajoute le pont de barillet et le pont de tourbillon en saphir, tous deux redessinés pour l’occasion. Cette pièce adopte de plus le système de suspension du mouvement par câble développé pour la RM 27-01 Rafael Nadal, octroyant toute sa légitimité au concept de transparence qui permet de découvrir dans les moindres détails l’incroyable architecture du calibre. En 2015 enfin, le modèle RM 56 Felipe Massa Saphir reprend les lignes et le mouvement de la première RM 56, tout en modifiant l’esthétique du cadran et de la couronne.

L’année en cours marque sans aucun doute une étape supplémentaire dans les boîtiers transparents.
Feu d’artifice en 2016

Limitées à 5 ou 10 exemplaires, flirtant toutes avec les CHF 2 millions, ces montres ne vont pas tarder à donner des idées à d’autres Maisons. À commencer par H. Moser & Cie, qui présentait au salon de Bâle 2015 la Venturer Tourbillon Dual Time Sapphire Skeleton. Pièce unique, elle a la particularité, en plus de son boîtier en saphir, d’être équipée d’un bracelet en caoutchouc réalisé par « additive manufacturing », c’est-à-dire avec une imprimante 3D. « Je voulais montrer que le registre classique dans lequel évolue H. Moser & Cie pouvait être un terrain de jeu très motivant, raconte Edouard Meylan, CEO de la marque. Mais je dois bien avouer que cela a été plus compliqué à mettre en œuvre que ce que j’avais anticipé ! » Prix de l’exclusivité : CHF 1 million.

H. Moser & Cie Venturer Tourbillon Dual Time Sapphire Skeleton
H. Moser & Cie Venturer Tourbillon Dual Time Sapphire Skeleton

Si, depuis 2012, il ne s’est pas passé une année sans le lancement d’un modèle en saphir, l’année en cours marque sans aucun doute une étape supplémentaire dans les boîtiers transparents. Depuis quelques semaines, on assiste à un véritable feu d’artifice avec, en guise d’artificiers, MB&F, Rebellion, Hublot et bien sûr Richard Mille, qui présentent chacun un, voire plusieurs modèles. Limitée à 10 exemplaires en or rose et autant en platine, la HM6 SV de MB&F est certainement la plus complexe en termes de boîtier. Pas moins de 11 éléments, dont des demi-sphères creuses, sont collés les uns aux autres à haute température et sous vide. « Cette idée d’une boîte transparente nous anime depuis la création de MB&F, souligne Charris Yadigaroglou, responsable de la communication. Le mouvement de la HM6 est si délirant avec ses 500 composants qu’il nous a paru logique de tout montrer. » À respectivement CHF 350 000.- et 380 000.-, elle n’est cependant pas la plus chère.

MB&F HM6 SV
MB&F HM6 SV

Même réflexion chez Rebellion, petite marque indépendante installée sur la côte vaudoise et propriétaire d’une écurie automobile, Rebellion Racing. « En sachant que la durée de vie d’un outil en diamant est de 20 à 30 minutes, et qu’il nous a fallu 47 600 minutes pour fraiser ce boîtier, on réalise toute la difficulté de la démarche, explique le CEO Philippe Dubois. Cette Magnum 540 Tourbillon Saphir, pièce unique créée par l’horloger David Candaux, vaut CHF 1,8 million. Mais je pense que nous allons la coupler à une de nos voitures qui a gagné les 24 Heures du Mans, elle aussi pièce unique ! » Valeur du lot : CHF 4 millions.

Une autre tendance pointe déjà le bout de son nez : la couleur.
La vie en rose

Mais si 2016 marque un tournant, c’est aussi sur le front de l’industrialisation. Jusqu’ici éditées en pièces uniques, voire en très petites séries, les montres en saphir sont soudain proposées à 500 exemplaires. C’est ce qu’a fait Hublot avec la Big Bang Unico Sapphire. Un projet « à grande échelle » qui a permis de réduire le prix à la pièce à CHF 55 000.-. Un montant qui tranche avec les CHF 500 000.- de la très conceptuelle MP-05 « LaFerrari » Sapphire. Limitée à 20 exemplaires, cette dernière affiche une réserve de marche de 50 jours grâce à 11 barillets solidaires disposés verticalement au cœur de la montre.

Richard Mille RM07-02
Richard Mille RM07-02

Si Hublot est parvenue à baisser le prix de vente de ses montres en saphir en augmentant les quantités, une autre tendance pointe déjà le bout de son nez : la couleur. Richard Mille a ainsi présenté la RM 07-02 Automatique Pink Lady Saphir, dont le saphir est coloré dans la masse. De son côté, Hublot sort à Baselworld 2016 un modèle Big Bang Unico Sapphire All Black à CHF 60 000.- obtenu par métallisation. Décidément, les limites sont faites pour être sans cesse repoussées…

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