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Recycler pour mieux durer, une bonne ID !
Culture

Recycler pour mieux durer, une bonne ID !

mercredi, 3 mars 2021
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Marie de Pimodan-Bugnon
Journaliste indépendante

“Il faut absolument être moderne.”

Arthur Rimbaud

De la passion, beaucoup de curiosité et une bonne dose d’émerveillement ! La recette essentielle pour raconter les mille et une facettes de l’horlogerie…

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6 min de lecture

Des déchets au poignet ? Sur le papier, le concept ne fait pas rêver. Il a pourtant tout pour plaire. Rencontre avec Panatère et ID Genève, deux acteurs de l’horlogerie qui donnent l’exemple avec des montres durables issues à 100 % de l’économie circulaire suisse.

Son allure est sobre et élégante. Boîtier classique de 41 mm en acier, cadran noir, bleu ou gris, trois aiguilles, une date discrètement positionnée à 3 h… À première vue, ce n’est pas par son design que la montre Circular 1 lancée par la nouvelle marque ID Genève sort des sentiers battus. Mais plutôt par sa fabrication inédite qui remet en question les modèles de production traditionnels. Le concept ? S’éloigner d’une démarche linéaire où « l’on achète, consomme et jette » en se basant exclusivement sur une approche circulaire où les déchets sont revalorisés. « Nous en rêvions depuis des années, explique Nicolas Freudiger, cofondateur de la marque. Quand nous avons commencé à concrétiser ce projet, nous nous sommes dit qu’on allait y arriver non pas avec un design mais plutôt avec une identité forte. Nous nous sommes fixé trois missions : manufacturer des montres à 100 % issues de l’économie circulaire suisse, changer la perception sur les matériaux recyclés dans l’horlogerie haut de gamme et inciter l’industrie à se tourner vers des projets plus durables. » Un projet des plus ambitieux pour cette jeune pousse de l’horlogerie née en 2020 à partir d’une campagne de financement participatif sur la plateforme suisse « wemakeit ».

Un acier 100 % recyclé, local et traçable provenant des déchets des entreprises du secteur horloger ou médical du Jura.

En quelques semaines, la campagne a permis à la marque de récolter CHF 315’000.- et de démarrer la production de 300 montres, confirmant l’adage selon lequel la fortune sourit aux audacieux. Car de l’audace, ces jeunes entrepreneurs en ont à revendre. Côté habillage, le boîtier de la montre Circular 1 est taillé dans un acier 100 % recyclé, local et traçable provenant des déchets des entreprises du secteur horloger ou médical du Jura. Résultat : un bilan carbone 10 fois moins élevé que pour un acier standard. Côté mouvement, ID Genève utilise exclusivement des calibres automatiques issus de stocks invendus et « démantelés, réassemblés puis réglés à de meilleurs standards que du neuf avant d’être reconditionnésj». Bilan : une empreinte carbone quasi neutre pour ces mouvements qui, selon Nicolas Freudiger, « reviennent finalement plus cher que des mouvements neufs ». Le bracelet est quant à lui fabriqué à partir de compost végétal – du marc de raisin à 80 % – sans ajout de plastiques ni additifs chimiques. Pour boucler la boucle, le packaging participe lui aussi à ce modèle de production vertueux puisqu’il est intégralement fabriqué avec des champignons cultivés dans un moule, que l’on peut ensuite composter dans son jardin.

Faire du problème une solution

Si ID Genève a pu tout récemment mettre son modèle Circular 1 en production, c’est que les jeunes entrepreneurs ont su s’entourer des bons partenaires. Parmi ces derniers, l’entreprise Panatère, fournisseur d’un nouvel acier 100 % recyclé et recyclable. L’aventure Panatère a démarré il y a cinq ans par un problème que son fondateur, Raphaël Broye, a eu la bonne idée de transformer en solution écologique. « Nous sommes actifs dans la sous-traitance horlogère depuis une quarantaine d’années et nous nous sommes retrouvés il y a cinq ans face à d’importants soucis d’approvisionnement en acier de qualité, explique-t-il. Nous nous sommes adressés à plusieurs gros aciéristes en Europe, mais nous nous sommes retrouvés confrontés à des problèmes de quantité. Notre demande n’intéressait personne. C’est là que nous avons eu l’idée de monter un réseau de partenaires issus de la sous-traitance horlogère et médicale dans l’arc jurassien pour mutualiser la collecte de nos déchets. Nous avons tous installé des bennes de tri et de collecte aux portes de nos usines et, une fois tous nos déchets regroupés, nous avons réussi au bout de quatre ans à constituer un premier lot de 50 tonnes. »

Tri et traçabilité

Le principal défi a consisté essentiellement à mettre en place un système de tri permettant d’obtenir « la Rolls-Royce de l’acier », sans aucun ajout de chimie ou de minerai. « Comme nous visions une production proche du zéro carbone, précise le fondateur de Panatère, il a fallu créer une méthodologie très stricte. » Concrètement, la première étape consiste à trier les déchets et copeaux d’acier de manière très sélective puis à compartimenter chaque nuancier d’acier. Les compartiments sont ensuite scannés afin d’assurer une traçabilité de leur composition avant mise sous scellé. Deux fonderies situées dans un périmètre de 250 km se chargent ensuite de produire cet acier secondaire sous forme de lingots finalement transportés dans un centre de stockage. Actuellement, Panatère est en mesure de produire 50 tonnes d’acier recyclé par semestre. Une goutte d’eau comparé aux 120’000 tonnes d’acier inoxydable utilisées en Suisse chaque année, tous secteurs confondus. Mais ce modèle labellisé Circular Economy Switzerland fait ses preuves et pourrait bien faire des émules.

Nous avons fondu notre premier lingot à l’énergie solaire Il y a quelques semaines, dans un four industriel des Pyrénées françaises.
Raphaël Broye

En attendant, l’entreprise basée à Saignelégier ne compte pas se reposer sur ses lauriers. « Il y a quelques semaines, nous avons fondu notre premier lingot à l’énergie solaire dans un four industriel des Pyrénées françaises, s’enthousiasme Raphaël Broye. Mon rêve, aujourd’hui, serait d’installer un four solaire identique dans la Watch Valley, ce qui permettrait de produire environ 200 tonnes d’acier solaire par année. » De quoi encourager quelques maisons horlogères à se tourner vers cet acier dont l’empreinte carbone est 165 fois moins élevée que pour un acier standard. Et, du déchet au poignet, nous autoriser à rêver d’une horlogerie plus durable.

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