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Temps de vol
Histoire & Pièces d'exception

Temps de vol

vendredi, 20 juin 2008
Par Louis Nardin
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Louis Nardin
Journaliste et consultant

“De l’audace, toujours de l’audace.”

Georges Jacques Danton

« Une montre de qualité concentre de la créativité, des compétences techniques et scientifiques rares, des gestes anciens. Elle touche au désir d’être unique, de se distinguer, d’afficher un savoir, une puissance, un goût. Une montre raconte plusieurs histoires à la fois, dont les détails et les secrets font la saveur. »

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7 min de lecture

Les aviateurs décollent toujours avec une montre dans le cockpit. Comme pour les marins, le temps est un paramètre capital qui permet de se repérer. Outre les compteurs de bord, des marques horlogères ont développé des montres de poignet dotées de fonctions utiles en vol. Le chronographe retour-en-vol ou la règle à calcul sont deux inventions qui sont nées de la rencontre entre mesure du temps et aéronautique.

Pour ne pas se perdre dans l’atmosphère, tout pilote s’envole avec le temps sur lui. Afin de calculer sa position, de suivre un itinéraire ou de synchroniser des changements de cap, ce dernier doit connaître l’heure et c’est pourquoi tous les appareils sont munis d’une montre de bord. Aujourd’hui, l’électronique règne sans partage dans les cockpits avec GPS et autres instruments de navigations ultra précis. Mais avant cela, les horlogers s’étaient surpassés pour participer à la conquête du ciel.

Alors que, dès 1939, l’Europe s’enfonce dans la guerre, les armées de tous bords produisent du matériel militaire à tour de bras. Les avions en font partie. Pour les équiper, les usines commandent des milliers de montres de bord, une aubaine que les maisons horlogères suisses saisiront au vol. La manufacture LeCoultre, devenue Jaeger-LeCoultre, IWC, Omega, Lemania mais aussi Patek Philippe ou Vacheron Constantin ont, par exemple, honoré ce genre de commandes.

Mais, même si l’on fabrique en série des compteurs militaires, la recherche battait son plein depuis plusieurs années sur d’autres plans. Quelques marques avaient déjà vu un intérêt à développer des produits utiles aux aviateurs, en particulier des montres de poignet proposant des fonctions inédites. Alors qu’elle occupe une place centrale dans le chronométrage d’événements sportifs comme les Jeux Olympiques, Longines prend une longueur d’avance en explorant les deux voies les plus porteuses en aéronautique : le positionnement et le calcul des temps courts.

Question de repérage

Pour la manufacture de Saint-Imier, tout commence avec la présentation en 1929 de la Weems, du nom du commandant américain Philipp van Horn Weems, qui met au point un système complet de navigation dont la montre est un élément central. Dotée des trois aiguilles heures, minutes et secondes, cette dernière est munie en son centre d’un disque indiquant une deuxième fois les secondes. Facilement réglable, il permet de synchroniser la montre avec le signal horaire radiodiffusé, un must pour gagner en précision de vol.

En 1931, revenu de sa traversée de l’Atlantique en solitaire, Charles A. Lindbergh reprend l’idée et la complète. En ajoutant plusieurs indications sur les cadrans et la lunette, il invente un nouveau modèle capable d’indiquer l’angle horaire en plus de l’heure. Pour les aviateurs, cela signifie qu’ils ont désormais à disposition un instrument capable de leur donner fidèlement leur position. Même si, pratiquement, la montre reste difficile à utiliser à cause des conditions générales de vol (gants qui empêchent les manipulations, vibrations de la machine ou encore difficultés de lecture), la Lindberg à Angle Horaire sera un succès. « Elle était vendue exclusivement aux compagnies aériennes, raconte Frédérique Donzé, documentaliste du musée Longines. Lufthansa ou Swissair l’avait par exemple adoptée. » Mais les progrès techniques, notamment avec les radars, signeront sa fin : la production est stoppée en 1947, avant d’être relancée en 1987, cette fois en tant que pièce historique.

Charles A. Lindbergh a marqué l'histoire en étant le premier pilote à traverser l'Atlantique sans escale (1927). Il utilisera ses connaissances aéronautiques pour mettre au point la première montre capable de calculer l'angle horaire
Charles A. Lindbergh a marqué l'histoire en étant le premier pilote à traverser l'Atlantique sans escale (1927). Il utilisera ses connaissances aéronautiques pour mettre au point la première montre capable de calculer l'angle horaire
La fonction retour en vol

En altitude, les itinéraires se calculent selon des caps et des temps prédéfinis. L’utilité d’une montre capable de mesurer les temps courts s’avérait donc incontournable d’où l’intérêt du chronographe. Breitling est la première, en 1934, à produire un modèle doté de deux poussoirs. Mais les boutons restaient difficiles à atteindre rapidement. A cela s’ajoute un élément fonctionnel. Plus que de connaître le temps écoulé, les pilotes avaient surtout besoin d’un compteur qui démarre sur demande et qui se remette le plus vite possible à zéro pour amorcer une nouvelle mesure. Cela servait, par exemple, à calculer des rondes d’attente avant d’atterrir.

Là encore Longines s’impose en pionnière. En 1938, la manufacture est la première à dévoiler un mouvement chronographe « retour-en-vol », « flyback » et encore « taylor ». Ici, un seul poussoir assume toutes les fonctions. Une pression sert à déclencher le mécanisme tandis qu’une seconde l’arrête et le remet instantanément à zéro avant qu’il ne redémarre aussitôt. Pour les puristes, la fonction apparaît comme une anomalie puisqu’on ne peut pas lire le temps écoulé. Reste qu’aujourd’hui encore, des pilotes continuent de l’utiliser. D’ailleurs, plusieurs marques le proposent dans leur assortiment pour offrir une variation originale au chronographe traditionnel.

Lunette calculatrice

A Granges au pied du Jura, Breitling suit une autre piste et planche sur une règle à calcul capable de résoudre plusieurs opérations mathématiques. En 1942, elle lance un premier modèle doté de cette fonction. Mais le succès viendra dix ans plus tard avec la présentation de la Navitimer, un nouveau chronographe conçu spécialement pour répondre aux besoins de la navigation aérienne. Le principe de base est le même que sur le précédent modèle avec une lunette extérieure graduée coulissant le long d’une seconde échelle, fixe, elle, et décalquée sur le pourtour du cadran. D’une simple manipulation, le pilote peut désormais effectuer dix calculs différents comme la multiplication, la division, la consommation de carburant, le taux de montée, de descente, la vitesse moyenne ou la conversion de distances. Ici encore, la petitesse des indications rend l’utilisation de la règle à calcul ardue, ce qui n’a pas empêché la Navitimer de devenir une référence dans les montres aéronautiques et d’occuper une place de choix dans le cœur des collectionneurs.

En 1952, Breitling présente la Navitimer, un modèle doté d'une règle à calcul multiple et qui s'imposera au fil du temps comme un must pour les collectionneurs © Breitling
En 1952, Breitling présente la Navitimer, un modèle doté d'une règle à calcul multiple et qui s'imposera au fil du temps comme un must pour les collectionneurs © Breitling
Introduction du quartz

L’arrivée du quartz ouvre d’entrée de nouveaux horizons en termes de fonctionnalités. Et là encore, la marque au « B » ailé se distingue. En 1986, le modèle Aerospace quitte pour la première fois les ateliers. En plus d’un chronographe au centième de seconde, ce dernier affiche, entre autres, un second fuseau horaire et un compte à rebours, deux fonctions précieuses pour les pilotes car la première affiche l’heure sur le lieu de départ et sur celui d’arrivée, et la seconde permet d’évaluer le temps de vol en fonction, entre autres, de la consommation d’essence du moteur. Il marque de fait le début d’une série d’autres modèles où la microélectronique occupe une place centrale, confirmée par le lancement en 2001 du mouvement SuperQuartz, un calibre qui affiche une précision dix fois supérieure à un homologue standard. D’instrument de bord, la montre s’est muée en un accessoire évoquant le vent, la vitesse et la technique. Et sur ce terrain là, la recherche ne s’arrête pas.

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